Résumé
Note de mise en scène
La presse
«Avant, je croyais que notre métier, cétait dinventer des choses; maintenant, je crois que cest de bien les raconter.» B-M K
Un homme seul, dans la rue, sous la pluie, il ne possède plus rien. Son seul secours dans ce monde, cest la parole. Alors il sinvente un interlocuteur imaginaire. Il lui raconte ses joies, ses rêves, ses déceptions. Il crée son propre monde pour exister.
Texte sur la solitude, lexclusion, la marginalité, «La nuit juste avant les forêts» est une descente aux enfers dun personnage arrivé à un point de non-retour. Cet homme na plus rien, il ne vit que de ses souvenirs, de ses rêves manqués, de ses projets utopiques. Pourtant il est là et il existe. Il existe grâce à ce flot de parole incontrôlé sans fin, ni commencement réels.
Ces mots sont un souffle de vie qui traverse le personnage durant toute la pièce, car sil nous crie sa rage et son malheur, il nous dit encore davantage son amour et sa foi en lhumanité. «La nuit juste avant les forêts» doit être un spectacle double : une descente aux enfers, certe, mais aussi un hymne profond à la tolérance et à lespoir. Loin dune forme monologuée et statique, nous avons cherché à pénétrer lintimité blessée de ce personnage et à utiliser son imagination délirante pour créer un univers très visuel, tantôt ludique, tantôt violent.
Une ambiguïté sinstalle alors : sommes-nous dans un rêve ou dans la réalité ? personne ne peut répondre à cette question comme personne ne peut identifier linterlocuteur fantôme auquel le personnage adresse la totalité de son discours, le mystère est une des composante magique de cette oeuvre de Koltès.
Nous navons donc pas cherché à savoir où nous sommes, mais à laisser ce personnage fort et fragile, mi-homme mi-enfant nous inviter à ce voyage vers son passé incertain et vers un futur glorieux et désespéré...
«Le langage du désir est un langage intérieur qui ne me semble pas être défini, délimité, daprès le destinataire.» B-M K
«La nature peut souvent réécrire un roman» B-M K
Un jeune homme perdu, éperdu. On ne quitte pas tout à fait le monde de Maréchal avec Emeric Marchand, qui fut un piaffant dArtagnan dans les Trois Mousquetaires. Justine Heynemann a mis en scène Emeric Marchand, dans le fameux monologue de Bernard-Marie Koltès, «La nuit juste avant les forêts». On sait quil y est question dun jeune homme perdu, éperdu, errant sous la pluie en quête damour, adressant à un compagnon imaginaire ses réflexions et doléances sur létat du monde à partir du spectacle de la rue : le travail, le racisme, le sexe, la solitude... Cest comme une partition de drague pudique, avec des éclats de violence et des phrases de douceur denfance. Emeric Marchand danse littéralement ces mots, quil mâche avec un grand bonheur manifeste. Cela constitue une pleine réussite plastique, avec une abondance de signes comme jonglés, au moyen dune incessante acrobatie au milieu des embûches de sens. Une telle sincérité dans lemportement matrisé témoigne dun sûr instinct de la scène, en même temps que du plus noble sens du don.
Jean-Pierre Léonardini (LHumanité)
53, rue Notre Dame des Champs 75006 Paris