L'action se passe à Naples en 1799.
« L'année 1799 vit l'instauration et la chute de la République Parthénopéenne. Après la fuite du roi Ferdinand IV (décembre 98) qui se réfugia en Sicile, les libéraux
- ou Jacobins - se rallièrent aux Français, contrairement aux gens du peuple, les lazzaroni (janvier 1799). Bientôt le Cardinal Ruffo, conseiller du roi, débarqua en Calabre, rallia une armée et marcha sur Naples contre les Jacobins en brandissant les enseignes de la Santa Fede (la Sainte Foi). Les Sanfedistes arrivèrent aux portes de Naples au début de juin et s'emparèrent de la ville. La répression fut terrible, allant jusqu'à des actes de cannibalisme. Fin juin, la République Parthénopéenne avait vécu. »
(Valeria Tasca)
Mantio Santanelli imagine un face-à-face radical (la pièce pourrait s'appeler L'Utopie et la nécessité): celui de Janara, une femme du peuple affamée, en quête quotidienne des moyens de survivre et de nourrir sa nombreuse famille, et d'un Jacobin rousseauiste, « nourri » par sa foi en la raison et la bonté naturelle de l'Homme. Janara l'a fait prisonnier et s'apprête à le faire passer à la marmite. Sans la moindre culpabilité: ses seules hésitations concernent t'assaisonnement
- échalotes ou oignons.
D'emblée éclate l'humour grinçant, sans concession, de la situation qui conservera jusqu'au bout sa tonalité
tragico-burlesque. On pense au film de Comencini, Affreux, sales et méchants. On pense aussi à Dario Fo: derrière le rire, derrière la cruauté (la crudité-
) de l'affrontement, la pièce, sans la moindre trace de didactisme, sans porter aucun jugement de valeur, confronte deux vérités, deux langages, deux cultures, et pose, sur un mode ludique, quelques questions très actuelles sur l'homme, ses rêves (même Janara pourrait chanter Foule sentimentale) et sa part d'inhumanité, d'un point de vue politique et éthique: « Et puis la misère. La voix de ta conscience et de l'honneur est bien faible lorsque les boyaux crient » disait déjà le Neveu de Rameau au Philosophe...
Mettre en scène Le Baisemain, ce sera d'abord éviter de tomber dans le piège du « napolitanisme ». Refuser tout régionalisme, gommer l'anecdote, le naturalisme, aussi bien dans la scénographie que dans la direction d'acteurs.
La direction d'acteurs consistera essentiellement à rendre sensible le chemin que parcourent l'un vers l'autre les deux protagonistes, chemin d'autant plus important qu'il n'infléchit en rien la nécessaire « catastrophe ». Pas de psychologie, ni de stéréotypes, pas de « Mamma », ni « d'intellectuel ». Jouer pleinement la situation dans ce qu'elle a de tendu, d'irréductible, et finalement, d'émouvant.
En contrepoint, un commentaire musical très présent, comme une musique de Nino Rota pour Fellini, ironique et foraine.
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