Le Boucher

Marseille (13)
du 6 au 16 mars 2003

Le Boucher

“Le Boucher“ annonce un courant littéraire et cinématographique de femmes. De simple « objet de désir », la Femme veut devenir « sujet » (Alina Reyes, Corps de Femmes)

Présentation
L’origine
Une quête humaine et artistique
De la littérature érotique à la scène
L’actrice
La parole, le souffle de vie
La scénographie
La Presse
Extrait

« Je crois que lorsque vous écrivez, vous pouvez tout écrire, que rien n’est interdit. Vous êtes libre, totalement libre, ainsi je pensais que c’était une littérature comme une autre » Alina Reyes (interview Phil Abbot, 31/05/2001)

… La chair du bœuf devant moi était la même que celle du ruminant dans son pré, sauf que le sang l’avait quittée, le fleuve qui porte et transporte si vite la vie, dont il ne restait ici que quelques gouttes comme des perles sur le papier blanc.

Et le boucher qui me parlait de sexe toute la journée était fait de la même chair, mais chaude, et tour à tour molle et dure ; le boucher avait ses bons et ses bas morceaux, exigeants, avides de brûler leur vie, de se transformer en viande. Et de même étaient mes chairs, moi qui sentais le feu prendre entre mes jambes aux paroles du boucher…

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Le boucher annonce un courant littéraire et cinématographique de femmes qui s’expriment sur la sexualité des femmes. De simple « objet de désir », la femme « veut aussi devenir sujet ».(Alina Reyes, Corps de femmes)

Je veux prolonger cette parole au théâtre. Je veux que nos différentes voix de femmes (auteur, comédienne et metteur en scène) se mêlent et s’échangent.

J’ai découvert ce livre à dix-huit ans. Pour la première fois dans mon expérience de lectrice, j’étais dans une relation intime avec le roman. J’avais l’impression de pénétrer la pensée de l’héroïne.

La nécessité de partir à la découverte de soi et la conscience que certaines choses doivent mourir trouvaient alors un sens.

La sexualité se révélait un moyen, et non une fin en soi. Cette sexualité était celle d’une femme, totalement assumée et évidente, ce qui suscitait en moi un certain émoi.

Raconter l’histoire de ce parcours initiatique, c’est témoigner de l’indispensable quête de nous-mêmes.

Aujourd’hui, c’est cette expérience de l’intime que je veux transposer au théâtre, ainsi que la force de cette écriture. Très poétique. Toujours très musicale.

Alexandra Tobelaim

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Une jeune fille s’interroge sur le fonctionnement du monde et, à travers ses peintures miniatures, essaie d’en reproduire la réalité. 

La rencontre avec un homme, le boucher, va lui permettre de s’accomplir.

Elle cède peu à peu aux paroles et aux désirs du boucher ; elle fait l’amour une après-midi entière avec lui.

C’est une découverte gourmande et sensuelle de l’homme. Elle touche, elle tète, elle goûte, elle suce. Elle découvre la jouissance partagée.

Cette aventure la conduit immédiatement à une autre rencontre sexuelle très brève. 

Suite à ces deux expériences, elle trouve sa place au sein du monde, recommence à créer, renaît.

Le texte utilisé dans le spectacle n’est pas le roman dans son intégralité. Les passages choisis cherchent à respecter la chronologie du roman, l’histoire, le parcours intérieur de la « jeune fille », le rythme de l’écriture. Ils sont l’origine du sens de notre travail.

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La littérature érotique nous pare de nos fantasmes, de nos obsessions, nous fait écouter ce que l’on rêve d’entendre au plus profond de nous. Elle alarme nos sens et nous plonge dans la sensualité. Sans provocation. Dans l’intimité.

Comment susciter le désir, réveiller les sens ? Plonger dans l’érotisme ? Comment traduire le vertige suscité par les mots du boucher ?

C’est le chemin de l’intimité, du dialogue avec le plus profond de nos âmes et de nos pulsions que nous voulons prendre.
Sans provocation. Sans choquer pour dénoncer. Nous voulons exprimer ce rapport intime que chaque individu entretient avec la lecture.

Comment recréer cette intimité au théâtre ? Comment donner au public un espace d’intimité et d’isolement tout en étant public ?

Cette expérience est le reflet de notre condition humaine : toujours seuls et uniques et pourtant si entourés de nos semblables.

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L’actrice est un des vecteurs du désir. Par sa présence, et sa voix, elle nous rend sensibles à notre propre désir.

Dans ce roman, la parole est le « personnage » érotique. La sensualité passe par la parole. Le mécanisme du pouvoir des mots sur l’imaginaire est clairement mis en évidence.

Nous voulons donner une vraie place à l’imaginaire et aux mots ; trouver l’érotisme dans les parties du corps les plus anodines.

Allons vers la nudité de la parole plutôt que vers la nudité du corps, car notre imagination nous entraîne plus loin que notre vision.

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Dans la première partie du texte, les deux personnages sont submergés par les mots qui s’échappent de la bouche du boucher. La parole dit la puissance du désir. Les mots sont échangés, sur le souffle, chuchotés en secret.

« Mais ce qui maintenait le boucher en vie, c’était son désir. La revendication de la chair constamment entretenue et de temps à autre matérialisée par ce souffle entre ma bouche te son oreille. Et peu à peu, par la magie d’une puissance plus forte que ma volonté, je sentais son désir devenir le mien. »

Dans la deuxième partie du texte, il n’y a plus de dialogue verbal. Mais un dialogue charnel. Le plaisir érotique transforme la parole en simple son.

« Nous jouissons ensemble, longuement, nos liquides confondus, nos râles confondus, venus de plus loin que la gorge, des profondeurs de nos poitrines, des sons étrangers à la voix humaine. »

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Dans notre quête d’intimité et de relation personnalisée avec le public, nous souhaitons que» chaque souffle articulé » soit chuchoté individuellement au spectateur, comme autant de fantasmes ou de rves personnels. Que ces paroles soient des paroles qu’on ait toujours voulu entendre au plus profond de nous-même.

La musique
Elle intervient dans la deuxième partie du texte. Elle est une abstraction supplémentaire, qui nous renvoie en nous-mêmes. A notre intimité. La voix parlée dérape à la limite du chant. La musique accompagne, soutient, enveloppe ces dérives. Elle prend le relais de la parole, pour nous raconter leurs ébats amoureux.

La lumière
Le travail de la lumière emprunte deux principes proches de la photographie.

La surexposition
Trouver le noir par trop plein de lumière. C’est-à-dire tricher, jouer avec la perception du spectateur, être en pleine lumière et pourtant dans l’impossibilité de voir un corps sur scène.

Le contre jour
Puis faire apparaître ce corps, sans voir la réalité de la peau.

Sensualité. Le corps est enveloppé par la lumière. Effleurer. Caresser. 

… et le monde était blanc comme sa blouse, comme la vitrine et comme le lait des hommes et des vaches, comme le gros ventre du boucher …

Monochrome blanc et végétal
« Le blanc sur notre âme agit comme le silence absolu. Ce silence n’est pas mort, il regorge de possibilités vivantes. C’est un rien plein de joie juvénile ou, pour mieux dire, un rien avant toute naissance, avant tout commencement. »

Avant toute chose, il y a le désir d’un espace monochrome.

« La comédienne revêt la blancheur de son costume initiatique. La scène est revêtue de blanc. La comédienne revêt la scène. »

Le décor est sa robe, c’est sa deuxième peau. Solidaire. C’est aussi sa chrysalide qui la contraint, qui crée des tensions.

La comédienne peut s’enrouler, disparaître, réapparaître par petits bouts. Jouer avec son corps, et la sensualité du corps. 

Rupture / Vert / Naissance

Apparaît alors le monde végétal en hommage à la nature créatrice.

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Grâce à un dispositif sonore ingénieux, Alexandra Tobelaim a instauré un rapport d’intimité entre le spectateur et l’actrice. Fred Kahn. Le Pavé 

Ces femmes ont réussi à donner au théâtre la beauté du fantasme, la douleur du désiret le plaisir des corps.Yves Gerbal. La Marseillaise

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" Je m’éveillai lentement, avec le bruit de la pluie contre les carreaux. Les draps étaient tièdes et doux, l’oreiller moelleux. J’ouvris les yeux. Il était couché près de moi, me regardait. Je portai la main à son sexe. Il avait à nouveau envie de moi. Je ne voulais que ça. Faire l’amour tout le temps, sans rage, avec patience, obstination, méthodiquement. Aller au bout. Il était comme une montagne à escalader, et il me fallait arriver en haut. " Alina Reyes. Le Boucher

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Informations pratiques

Criée

30, quai de Rive Neuve 13007 Marseille

Spectacle terminé depuis le dimanche 16 mars 2003

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