Les vingt-quatre étapes du Voyage d'hiver
Extrait
La douleur et la souffrance amoureuse
Les Lieder
" Une femme au printemps de sa vie porte l'hiver en son âme. Son amour a été trahi, l'hiver l'envahit. La neige recouvre la vie en train d'éclore. Le ruisseau figé par le gel, les oiseaux recroquevillés sur eux-mêmes, les branches noires des arbres sans feuilles, la lumière blafarde de la lune, toute la nature indique à ce jeune être le chemin dont personne n'est encore revenu.
Mon corps et celui de mes" figures" seront le miroir cassé de cette âme malade. On dit que l'amour "tourne la tête" : et si la tête de mon héroïne était réellement retournée ? On dit que l'amour "brise le cœur" : et si cette brisure s'ouvrait sur un flot de sang ? On dit que la douleur paralyse, la souffrance sépare l'âme et le corps… Nous tous avons vécu, nous vivons tout cela. Je demanderai à mes personnages de le rendre visible. "
Ilka Schönbein
« Mon cœur, dans ce ruisseau
reconnais-tu ton image ?
Sous son écorce
Le bouillonnement est-il aussi violent ? »
« Ah, que l’air est calme !
Ah, que le monde est beau !
Quand les tempêtes grondaient
J’étais moins malheureux. »
« Le frimas a saupoudré d’un
reflet blanc
ma chevelure.
Je me croyais déjà vieillard
Et m’en suis réjoui.
Mais tout a bientôt fondu,
J’ai de nouveau des cheveux
noirs.
J’ai horreur de ma jeunesse -
Quel long chemin jusqu’au tombeau ! »
« Aboyez encore, chiens à l’affût,
refusez-moi le repos à l’heure du sommeil !
J’en ai fini avec tous les rêves -
Qu’ai-je à m’attarder parmi les dormeurs ? »
Le Voyage d'Hiver - extrait du livret de Wilhelm Müller
D'après la traduction de C. Godin
La musique du Voyage d’Hiver de Franz Schubert et le livret de Wilhelm Müller ont littéralement bouleversé Ilka Schönbein. Pour elle, la douleur et la souffrance amoureuse qui mènent à la folie, la misère existentielle et le sentiment de perdition qu’elles engendrent, s’expriment par le corps. Cependant, si Schubert fait chanter les poèmes de Müller par un homme, elle transposera le rôle du héros au féminin et le jouera en compagnie d'un chanteur lyrique et d'une conteuse, accompagnés par un accordéoniste présent sur scène.
Ilka Schönbein décrit ainsi les vingt-quatre étapes de son Voyage d’Hiver : « Une femme au printemps de sa vie porte l'hiver en son âme. Son amour a été trahi, l'hiver l'envahit. La neige recouvre la vie en train d’éclore. Le ruisseau figé par le gel, les oiseaux recroquevillés sur eux-mêmes, les branches noires des arbres sans feuilles, la lumière blafarde de la lune, toute la nature indique à ce jeune être le chemin dont personne n’est encore revenu.
Mon corps et celui de mes figures seront le miroir cassé de cette âme malade. On dit que l'amour tourne la tête : et si la tête de mon héroïne était réellement retournée ? On dit que l'amour brise le cœur: et si cette brisure s’ouvrait sur un flot de sang ? On dit que la douleur paralyse, la souffrance sépare l'âme et le corps… Nous tous avons vécu, nous vivons tout cela. Je demanderai à mes personnages de le rendre visible. »
Merveilleuse actrice, marionnettiste et danseuse, Ilka Schönbein veut enrichir les vers de Müller par des images fortes et puissantes, à la fois tragiques et teintées de son humour si particulier, mais aussi créer un contraste par rapport à ce qu’il chante : « Comme dans mes précédents spectacles, il s’agira d’aborder des sujets qui ont une importance élémentaire dans la vie d’une femme : l’enfance, l’amour, la naissance, la vieillesse, la peur de la mort.
Quoi d’autre ? Le thème qui apparaît déjà dans Métamorphoses - et pénètre ma conscience avec de plus en plus d’acuité - est la danse de l’être : la danse de l’embryon dans le corps de sa mère, la danse de l’extase amoureuse, la danse qui remplit l’âme quand le corps souffre de l’angoisse, la danse contre la mort - la danse avec la mort. »
J’ai lu une histoire merveilleuse, hélas je ne sais plus où : « Par un hiver glacial, présent à l’appel du matin dans un camp de concentration, un jeune homme à moitié nu, complètement gelé et proche de la mort, entend derrière lui la voix d’un Juif : « Danse, danse, si tu es un vrai hassid, maintenant tu dois danser. Danse ! » Et le jeune homme arrache ses pieds à la terre, sa peau reste collée à la neige, il danse avec ses pieds saignants - et sauve sa vie. »
Puissantes paroles… Si je pouvais danser ainsi ! Une danse qui libère de notre crainte d’être là pour rien, mortels. Avec Métamorphoses, je me suis engagée sur ce chemin et il s’agit de le poursuivre. Je continue à chercher comment extraire des personnages de mon propre corps, des êtres qui finiront par prendre vie puis m’apprendront un jour, peut-être lointain, pourquoi ils sont nés.
Il me semble que c’est une façon très féminine de créer : les femmes se laissent souvent guider par leur corps qui les remplit et leur fait comprendre le sens et le contenu de leur existence. »
Ilka Schönbein
Le Voyage d’Hiver est l’une des œuvres musicales les plus populaires en Allemagne et en Europe. D'une très grande beauté, elle exprime le trouble amoureux dans toute son intensité qui, surtout pendant l'adolescence, relie le continent de l'extase à celui du désespoir.
Son célèbre interprète Dietrich Fischer-Dieskau, qui éclaire jusque dans les moindres détails les vers du poète romantique Wilhelm Müller et met en valeur les correspondances entre texte et musique au sein de formes souvent étonnantes de nouveauté et de liberté, décrit ainsi cette œuvre dans son livre Sur les traces des Lieder de Schubert :
« Même si d’après Schubert, la musique gaie n’existait pas, il ne s’était pourtant encore jamais attaqué à de telles variations en chaîne sur le malheur… Le protagoniste n’est pas nettement défini. La nature s’impose d’autant plus au regard. Le paysage d’hiver, avec ses tempêtes de neige, ses rivières gelées, ses arbres dépouillés et cette victime du froid et de l’inhospitalité qui les traverse, devient une plainte toujours renouvelée. Seize des Lieder sont en mineur, l’agonie n’en finit pas, elle ne cédera la place qu’à la folie. On ne doit pas avoir peur de l’impression glaçante que donnent ces Lieder lorsqu’ils sont interprétés correctement, sans concession aucune au charme ou à la sensiblerie autrichienne, ni craindre d’être mal reçu à cause de cela. »
Dietrich Fischer-Dieskau
Extraits du livret accompagnant le disque de Deutsche Gramophon 1995,
Polydor International 1966
Le sourire est la politesse du désespoir. (Mais à présent, l'entr'acte ne fait plus partie du spectcle qu'iIlka Schönbein n'arrête pas de ciseler.)
je n'ai absolument pas compris le motif de l'entracte... pourquoi faire une pause aussi joyeuse, décontractée... alors que toute la pièce nous plonge dans une ambiance lourde, pesante, triste.... j'aimerai de tout coeur avoir une explication car j'avoue que cet entracte m'a un peu gênée et j'ai eu du mal à me remettre dans l'ambiance quand la pièce a repris... merci...
Le sourire est la politesse du désespoir. (Mais à présent, l'entr'acte ne fait plus partie du spectcle qu'iIlka Schönbein n'arrête pas de ciseler.)
je n'ai absolument pas compris le motif de l'entracte... pourquoi faire une pause aussi joyeuse, décontractée... alors que toute la pièce nous plonge dans une ambiance lourde, pesante, triste.... j'aimerai de tout coeur avoir une explication car j'avoue que cet entracte m'a un peu gênée et j'ai eu du mal à me remettre dans l'ambiance quand la pièce a repris... merci...
2, rue Edouard Poisson 93304 Aubervilliers
Voiture : par la Porte d'Aubervilliers ou de La Villette - puis direction Aubervilliers centre
Navette retour : le Théâtre de la Commune met à votre disposition une navette retour gratuite du mardi au samedi - dans la limite des places disponibles. Elle dessert les stations Porte de la Villette, Stalingrad, Gare de l'Est et Châtelet.