Ce sont de vrais tyrans. Cruels, avides de pouvoir et laids comme des poux. Affreux en un mot. Leur mains sont comme des griffes de rapaces, leur regard est d'acier et leur bouche noire dessine un rictus de plaisir quand ils écrabouillent leurs pauvres victimes. Ce couple d'ogres de carnaval ne laissera personne indemne pour conserver son trône. Prêts à toutes les trahisons et tous les complots. Entre leurs mains, à leur merci, des créatures minuscules : fourmis, scarabées, vers de terre... Épouvantées, les bestioles tentent de sauver leur peau ou leur carapace.
Ce tandem infernal, c'est bien sûr Macbeth et sa Lady, mais aussi Père Ubu et Mère Ubu. On rit de leur folie sans mesure, on tremble pour ces insectes si humains. Claire Dancoisne a condensé la célèbre et flamboyante tragédie de Shakespeare pour en tirer un délicieux petit cauchemar, court, dense, jubilatoire. Le Théâtre La Licorne reprend ce chef d’oeuvre d'humour noir créé en 1997 et joué plus de 650 fois. N'ayons pas peur des mots : c'est un classique de la marionnette contemporaine. Ne le manquez pas !
Faire du théâtre comme on peindrait un tableau, c'est l'art de Claire Dancoisne. Depuis vingt-huit ans, spectacle après spectacle, elle donne jour à un monde bien à elle, rugueux, hirsute, baroque et un brin gothique, souvent traversé par le souffle de la rébellion, toujours empli de vitalité. La poésie jaillit de l'alliance entre le masque, le costume à accessoires, les objets articulés, un jeu scénique gestuel, qui parlent davantage que le texte, réduit au minimum. Dans le monde de La Licorne, la matière est reine : qu'elle soit ferraille, papier ou tissu, elle apporte une présence brute et dense. Une fantaisie née de l'artisanat de la bidouille. Son Cirque de la Licorne mené par une bande de vieillards increvables qui domptaient un rhinocéros, une mante-religieuse et des sardines en boîte, était un tourbillon d'énergie. Il a inspiré par la suite Les Encombrants font leur cirque.
Claire Dancoisne signe aussi bien de grandes épopées comme Le Cœur Cousu, échappée-belle d'une femme libre, couturière et magicienne, que des spectacles de petit format comme son fameux Macbêtes qu'elle reprend cette saison. La compagnie lilloise conçoit également des événements éphémères, en extérieur ou en salle, tels le Défilé de Haute Soudure, parodie rock’n’roll avec des costumes extravagants en métal et dentelles.
Désormais installée à Dunkerque, elle a inauguré la saison dernière son lieu de fabrique : « L'Outil de création européen pour la marionnette contemporaine et le théâtre d’objets ». Un nouveau chapitre dans l'histoire de cette compagnie majeure qui a contribué à ouvrir l'horizon de la marionnette contemporaine, défendant contre vents et marées la force de l'imaginaire et un théâtre populaire.
73 rue Mouffetard 75005 Paris