Présentation
Mot de l'auteur
Labyrinthes/des écritures contemporaines
Un personnage A suivant sans cesse une ligne droite rencontre un personnage B. Le premier n'est que mouvement. Le second immobilité.Chacun à sa façon attend quelque chose, un signe. Pour changer. Devenir.Droit devant ou pas bouger, deux points sur une ligne font connaissance, échangent des bouts de vie. Chacun dans sa langue d'origine.
Un titre, toujours comme une énigme, un rébus : pas bouger, ordre ou constat,
immobilité active. Impératif photographique : ne bougeons plus!, la pièce d'Emmanuel
Darley est-elle l'équivalent théâtral d'un "cliché" ? Saisie de l'instant,
suspension du fugitif, capture du mouvement, emprisonnement du temps.
Sinon : une sorte d'équation géométrique, un point A, suivant une ligne droite,
rencontre un point B, fixe. Puis continue de se déplacer. Puis rencontre un point B,
fixe. Autre. Identique. Puis continue de se déplacer. Puis rencontre un point B, fixe.
Toujours autre. Toujours identique. L'équation devient vertigineuse.
Deux guetteurs, dans l'espace vide. A l'affût. D'un signe. L'immobilité de l'un, le
mouvement de l'autre sont les postures préalables de leur attente, de leur quête.
L'immobilité, le mouvement sont les conditions de la quête, de l'attente. Le mouvement,
l'immobilité sont les faces opposées et complémentaires d'une même interrogation,
profonde et superficielle, angoissée et ironique, essentielle et inutile : comment vivre?
Les spectateurs, assis sur des bancs alignés, se font face. A leur droite, à leur
gauche, deux couloirs (quais ? travées ?) vides, que traverse A à grandes enjambées, ou
qu'occupe dérisoirement B, figé. De part et d'autre des spectateurs, par-dessus les
têtes, le dialogue s'installe, léger, effacé par moment par une musique de Gershwin.
Jean-Marc Bourg
Bonheur d'écrire. D'avoir écrit ça, Pas bouger, d'un trait, sans prévenir.
Bonheur de la première lecture. Des mots qui sonnent, se répondent du tac au tac. Du
rire des autres et puis du mien. Bonheur déjà des comédiens, Jean-Marc Bourg, Alex
Selmane.
Bonheur de ce chantier. Des lectures, des retouches. Du travail de théâtre qui prend
corps.
Bonheur de l'espace, grande salle déserte ne demandant qu'à prendre vie.
Bonheur du spectacle, bonheur d'être là sur un banc, simplement éclairé par deux
rampes, comme une piste d'atterrissage.
Voir A circuler, marcher toujours tout droit, apparaître, disparaître.
Voir B lentement s'éveiller, faire surface jusqu'à changer d'identité.
Se laisser envahir par les mots, les sons, les Mings.
Voir passer un instant un vélo, dring, dring.
Bonheur du travail de fourmi. Pas à pas, le travail Labyrinthes.
Rester simple, léger comme une plume et pourtant grandir, grandir.
Bonheur d'aller plus loin en bonne compagnie.
Avec A, avec B. Jean-Marc Bourg, Alex Selmane.
Emmanuel Darley
La compagnie Labyrinthes travaille depuis plusieurs années à la découverte et à la diffusion des écritures contemporaines. Sa démarche alterne les travaux de création et de recherche, en étroite collaboration avec les écrivains.
En résidence depuis janvier 1999, et jusqu'à juin 2002 au Centre Dramatique National de Montpellier / Théâtre des Treize Vents, la compagnie continue à développer un projet de théâtre et de création, fondé sur un travail permanent avec les écrivains. Ce projet, né des expériences successives menées au cours de la résidence au CDN, s'amplifiera à l'issue de cette résidence.
Labyrinthes a passé une commande d'écriture à Emmanuel Darley, à la suite d'un laboratoire d'écriture en octobre 1999. Pas bouger a été mis en chantier en mars 2000, dans le cadre d'Écritures en Jeu(x) à Montpellier. Le texte est publié aux Editions Domens, a été diffusé sur France Culture en juillet 2001 : le spectacle a été créé le janvier 2001 à Nîmes et a été représenté lors du dernier Festival d'Avignon à la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon.
159 avenue Gambetta 75020 Paris