«Hommes qui êtes ici, entendez ! Ecoutez-moi, ô vous qui, par les oreilles et le trou percé à travers l’os de la tête, entendez !Jusqu’ici, ô herbe ! Vous n’avez entendu que votre propre rumeur. Ecoutez l’ordre, écoutez la parole qui dispose ! entends, intelligence ! Je suis la force de la voix et l’énergie de la parole qui fait !» Paul Claudel – Tête d’or (extrait).
C’est la vigueur, l’insolence, la parole venue des origines grecques et trop longtemps refoulée depuis Shakespeare et Caldéron qui m’ont saisie chez le Claudel de Tête d’or. La révolte du héros tragique contre toutes les inerties. C’est aussi sa passion pour Rimbaud qui sourd dans chaque page et qui met le feu à la parole par fulgurance. Je sais pour l’avoir éprouvé avec Valère Novarina, que le théâtre est un lieu où il faut forer, jusqu’à révéler «l’or» véritable, l’alliage très pur où la pensée est matière et la matière pensée.
«L’or» de Tête d’or, c’est l’histoire éternelle de l’homme à la conquête du monde et de soi-même. Ce sera traité comme un conte très ancien avec ses grands récits épiques, en suivant les mouvements de l’écriture au plus près avec ses rythmes barbares, ses cavalcades, ses éclats et ses étendues vertigineuses. Monter Tête d’or, c’est nécessairement aménager la rencontre d’un grand texte et d’une troupe.
La troupe existe. Elle a son histoire, qui a conduit des acteurs venus d’horizons divers à se regrouper autour de deux spectacles communs : Le Repas et L’Opérette Imaginaire, et d’un même auteur : Valère Novarina. D’autres sont venus les rejoindre, en particulier André Marcon pour le rôle de Tête d’or. Un désir les soude, et les pousse à s’aventurer ailleurs vers des paysages tout aussi violents. Cela apparaîtra aux Bouffes du Nord avec son espace vide, sa profondeur, ses hautes lignes verticales et ses parois usées d’où semblent surgir par moments d’étranges figures… Claude Buchvald
37 bis, bd de la Chapelle 75010 Paris