La navette retour vers Paris (depuis le TGP de Saint-Denis). Tous les soirs, une navette gratuite est mise à la disposition des spectateurs à l’issue de la représentation. Elle dessert les arrêts : Porte de Paris – La Plaine Saint-Denis – Porte de la Chapelle – Stalingrad – Gare du Nord – Châtelet.
Parabole grotesque et fantaisiste dénonçant les théories raciales nazies, Têtes rondes et Têtes pointues présente une contrée imaginaire au sein de laquelle une gigantesque manipulation politique aboutit à la mise à mort organisée d’un peuple.
Après Le Cercle de craie caucasien et La Vie de Galilée, Christophe Rauck s’empare aujourd’hui pour la troisième fois d’une pièce de Bertolt Brecht. Un dramaturge qui, selon les termes du metteur en scène, « écrit sous les étoiles pour crier au monde qu’il croit aux histoires qui changent le cours de notre vie ».
C’est sans conteste ce qu’a fait Bertolt Brecht en signant, peu après l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir, cette farce politique aux accents cocasses et pathétiques. Une farce qui ouvre sur un monde sans morale et sans lendemain, dans lequel la fin justifie tous les moyens.
Comme souvent chez Brecht la société de classe corrompt l’individu. Pauvres et riches sont attachés les uns aux autres. Dans Têtes rondes et têtes pointues, c’est ce couple infernal que Brecht peint sur fond de xénophobie, où pour les besoins des plus riches « l’homme devient un loup pour l’homme ».
Le cynisme des uns va rencontrer la cupidité des autres et tout finira par s’acheter ou se vendre, la liberté, la vie, l’amour. Seules les deux jeunes premières trouveront grâce à nos yeux. Face au grotesque des situations qui jonchent la pièce, la mélancolie des jeunes filles inscrit l’histoire dans une terrible noirceur. Nanna et Isabella sont toutes les deux prisonnières de leur condition. L’une dans une maison closese fait exploiter par une mère maquerelle, l’autre pour rentrer au couvent se fera spolier de sa fortune par la mère supérieure. Les enfants n’ont pas d’avenir dans cette société, ils ne sont queles proies fragiles d’une humanité dégénérée qui n’hésitera pas à se servir d’eux pour sauver ses avoirs et ses privilèges.
C’est sûrement pour cela que Brecht situe sa fable au Yahoo, en référence à Jonathan Swift qui, dans le livre IV des Aventures de Gulliver, surnomme l’homme dégénéré le « Yahoo » face aux « Houyhnhnms », les « chevaux pensants ».
Le texte est très didactique, assez « sec », il n’y a pas de psychologie ou de sentiments entre les personnages. Le ressort est le profit. Si l’on est aussi didactique sur la période historique, on risque de perdre la force universelle du propos de Brecht, et sa poésie. Il n’y aura donc pas de référence à la période hitlérienne, ni d’actualisation. Au contraire, le décor, les costumes soulignent la fable, le fameux « il était une fois ». Le décor figure une ville, faite de différents plans et frises en carton, comme dans les livres d’images articulés. L’ensemble est léger, trèsmobile, et permet d’ouvrir ou de resserrer l’espace, et de jouer sur les points de vue et le rythme dela narration. Les chansons, écrites par Arthur Besson, sont plus nombreuses que dans la version originale. Tout cela tracera un chemin vers un univers assez sombre, mais onirique, avec un petit côté « carnaval », « farce et attrape ». Pour être finalement au plus près du « conte d’horreur » imaginé par Brecht.
Christophe Rauck
« Christophe Rauck signe une mise en scène populaire et joyeuse de cette pièce qui combine comédie musicale et théâtre de tréteaux, avec une distribution exemplaire. Du vrai théâtre populaire, héritier à la fois de Mnouchkine et de Benne Besson, ramenant à l'esprit des tréteaux. » Didier Méreuze, La Croix / 13 janvier 2011
« II faut rire de Têtes rondes et têtes pointues comme on rit lorsque l'on se rend au Palais des glaces et que l'on se découvre dans les miroirs déformants. La musique suscite de l'émotion, de l'inattendu, elle met du spectacle dans le théâtre, et Brecht l'utilise pour élargir son audience, atteindre le plus grand nombre. »
Christophe Rauck, propos recueillis par Agnes Santi, La Terrasse, janvier 2011
« Parmi les atouts majeurs du spectacle, la musique signée Arthur Besson sur laquelle les acteurs chantent aussi bien qu’ils jouent. » Annie Chénieux, Le Journal du Dimanche
« Tous, vraiment, nous tiennent en haleine, nous éblouissant de petits joyaux scéniques. » Sylvie Beurtheret, Les Trois Coups
« En 1933, Brecht écrit une farce noire sur la montée du nazisme. Christophe Rauck l'actualise avec truculence. » Emmanuelle Bouchez, Telerama
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