Le Tram 83 est un bar du bout de nulle part dans un lieu ravagé par la guerre et la folie des hommes. C’est aussi un livre déroutant et chaotique à la langue enflammée, un texte à la démesure de Lubumbashi, cette « ville-pays » de la République Démocratique du Congo où est né Fiston Mwanza Mujila, l’auteur de ce premier roman adapté à la scène.
Dans ce bar de passe d’une ville minière où les creuseurs, les somnambules, les canetons et les biscottes constituent la clientèle fidèle, la bière coule à flots au rythme du jazz, de la rumba des mots et des pulsions d’une libido tarifée. C’est ici que se fêtent les retrouvailles de Lucien, l’étudiant-écrivain, l’intellectuel, avec son ami d’enfance Requiem dit Le Nègus, petit empereur local de la très profane trinité débrouille, embrouille et magouille.
Lucien et Requiem, étrange duo des marges et des contraires, flanqué d’un éditeur et encalminé dans ce réceptacle des misères où les acolytes s’appellent Mortel Combat, Dysenterie ou Rougeole invincible, où les filles contrôlent la marche à suivre « de la Genèse à l’Épitre aux Corinthiens » et où se mêlent épaves interlopes, Marilyn d’un soir, truands à la longue semaine et autres touristes à but lucratif…
Devant une palissade de tôle ondulée, dans une distribution cosmopolite et une narration épurée, Julie Kretzschmar dresse une fresque-chaos, un tableau choral syncopé d’une Afrique fantasmée et revisitée.
159 avenue Gambetta 75020 Paris