« La marionnette restitue au comédien sa vraie fonction, être au service du personnage, parler pour lui. Elle est un formidable moyen de clarifier l'apprentissage du théâtre et d'écouter les textes d'aujourd'hui en même temps qu'elle ouvre de nouveaux territoires poétiques qui attirent de plus en plus de comédiens. » François Lazaro
Note de l'auteur
Extrait de Valises
Le Spectacle
La scénographie
« Je ne suis pas un immigré. J’ai écrit Valises en puisant dans mes souvenirs, en interviewant des gens, en inventant. Toujours avec le souci de mettre dans chacune des valises des questions, des évidences sur ce qu’on met dans une valise alors que l’on prépare le grand, l’énorme départ qui est celui qui va mener dans un nouveau pays où l’on va habiter.
Chaque valise contient le même nombre de mots. Je voulais ce format unique, comme à l’aéroport on tente de mettre le maximum de choses tout en mettant les choses les plus précieuses dans un bagage de 30 kilos.
Je voulais aussi que Valises soit un petit tour du monde de ceux qui partent en ce début de siècle. Une manière d’inventaire, un souci de dépoussiérer quelques idées reçues sur l’immigration, de mettre un coup de projecteur sur ce qui se passe dans l’ombre. »
Rémi Checchetto
« Ce qu’on met dans la valise et ce qu’on ne met pas dans la valise, ce qu’on emporte et ce qu’on n’emporte pas, ce qui reste et ce qui ne reste pas, ce qui compte et ce qui ne compte pas, ce qui compte et qu’on met dans la valise, ce qui compte et qu’on ne met pas dans la valise, ce qui ne compte pas et qu’on met dans la valise, ce qui ne compte pas et qu’on ne met pas dans la valise, on la fait, on la défait, on la refait, on a des certitudes, des évidences, des reniements, des contraintes, des envies, des n’importe quoi, ce qu’on emporte et ce qu’on n’emporte pas, ce qui nous emporte et ce qui ne nous emporte pas, ce qui nous déporte, risque de nous déporter… ».
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La valise éveille chez chacun cette nostalgie de l’ailleurs où tout est meilleur. Selon le cas, elle se fait obligation, échappatoire, vacances ou chance de survie. Rémi Checchetto a écrit une collection de textes d’une page sur les valises : textes qui jouent avec la langue et les situations de façon poétique, comique, cocasse, tendue mais reviennent la plupart du temps à cette petite douleur invisible qui forme la nostalgie d’être, d’avoir été ou de devenir un jour « soi même».
Les marionnettes s’emparent de ces textes avec gaieté et radicalité. Une porte, une valise, quelques accessoires, les voilà au cœur de l’essentiel. Les personnages entrent et sortent par la porte, se plient, se cassent, au sens propre et au figuré, ont mille démêlés avec leur valise qui les poursuit, les dévore ou les révèle.
Combien de rêves, combien de promesses, de projets, de regrets, de souvenirs, de désirs ? Partir ? Ne pas partir ? Ne jamais revenir ?
Le sujet est grave. Cependant le passage par la marionnette propose une grande distance et fait jaillir le comique, permettant à ce spectacle d'être vu en famille. Les marionnettes, contraintes de parler avec la totalité de leur corps, se placent dans des conditions cocasses, voire impossibles. Bien souvent, l’extrême pudeur de ceux qui souffrent leur donne ce même détour, le rire, pour parler de leur situation.
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La forme est radicale. Dans la marionnette à gaine, les personnages sont bougés, mus, émus, de l’intérieur par un invisible qui est leur vie même. Leur monde, le castelet, constitue également une perspective radicale. Il propose un espace où l’on ne voit jamais ni le sol, ni l’horizon. C’est un espace d’une grande justesse pour parler humainement de ceux qui sont loin de chez eux. Les comédiens sont derrière, cachés derrière ce paravent, bras levés, comme lors d'un contrôle d’identité.
Un élément de décor unique : la porte. Quelques valises, peu d'accessoires. Trois marionnettes jouent tour à tour tous les rôles (il faut bien faire tous les métiers).
Valises est une forme légère qui va partout et s’installe facilement, dans tous les lieux équipés ou non. Le castelet se pose au sol, au niveau des spectateurs, sans podium. Les chaises des spectateurs aussi sont au sol. L’éclairage est autonome. Il faut simplement pouvoir faire l’obscurité complète dans la salle.
Autant d’éléments qui tissent un réseau de signes discrets en résonance avec le sujet : partir, revenir, ne pas obtenir le visa ou le passage, subir la fouille, ne pas pouvoir revenir… Toujours la valise à la main, prêts à déménager, à partir… obligés à la forme légère d’un bagage minimum, prêts au départ imminent.
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35, rue Léon 75018 Paris