Spectacle en persan surtitré en français.
“Nous dormons pour atteindre un lendemain. Aujourd’hui, la meilleure chose à faire est de fermer les yeux.”
8 janvier, minuit, banlieue de Téhéran, il neige. Quatre jeunes femmes répètent Les Bonnes de Jean Genet dans une maison. Ali, le fiancé de Fati, qui fait son service militaire dans la police, les rejoint. Il n’est pas censé être là, mais Fati a insisté. Bravant la loi qui interdit à un soldat de porter une arme dans un lieu privé, il promet à l’officier de service de revenir au poste avant l’aube. La neige l’en empêche. Abdi a lui aussi rejoint la répétition. Ils sont tous contraints de passer la nuit dans cette maison.
Le lendemain quand Ali se réveille, il est seul et son arme a disparu. Mais la maison n’est pas le lieu de l’intrigue, ni l’arme l’enjeu véritable.
La pièce tisse une suite de conversations téléphoniques au lendemain de cette nuit. En filigrane, les dialogues évoquent la situation actuelle de jeunes gens en Iran qui cherchent des moyens de se faire entendre. Figure de passeur dans le milieu théâtral iranien, Amir Reza Koohestani, auteur-metteur en scène accueilli en Europe depuis 2002, a récemment contribué, avec Oriza Hirata et Sylvain Maurice, au spectacle Des utopies ?
Entre symbolisme et réalisme, ne cessant d’échapper aux limites imposées par la censure, il tend au public un miroir de sa société.
Cette capacité à passer d’une écriture concrète, presquedocumentaire, à un style davantage métaphorique, parfoisénigmatique, se double chez Koohestani d’une réelle aisance àesquiver les interdits. Tout spectacle joué en Iran doit en effet se soumettre à l’inspection d’une commission de censure qui s’applique à vérifier sa conformité à l’ordre moral officiel et le respect des valeurs du régime islamique.
En poète autant qu’en artiste engagé, Amir Reza Koohestani s’efforce toutefois de transmettre à son public une vision critique du monde dans lequel il vit – s’il peut lui arriver de dénoncer les travers de lamondialisation, il se livre avant tout à une dissection des maux de lasociété iranienne. Son langage ondoyant est assez allusif pour qu’il n’ait pas besoin d’énoncer frontalement son propos.
Il y associe en outre des dispositifs scéniques capables de suggérer des significations sans recourir à l’articulation des mots. [...] C’estd’ailleurs un point commun à bon nombre de metteurs en scène iraniens : à force d’explorer les possibilités d’expression non verbaleet les moyens de représentation indirecte, les artistes de théâtreont réussi à créer une sémiologie scénique qui fonctionne de manière transversale d’un spectacle à un autre. Une sorte de lexique commun s’en dégage, rapprochant une fois de plus les spectateurs iraniens de l’art scénique. [...]
Liliane Anjo
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