Anatole Felde & Gzion

le 14 décembre 2007

Anatole Felde & Gzion

Anatole Felde et Gzion deux pièces montées sous la forme d’un diptyque cohérent pour traiter de la création théâtrale. Farces modernes, drames burlesques ou comédies noires... ces deux courtes pièces, au ton original et drôle, à la mécanique redoutable, se jouent des appellations, des codes et des limites supposées du représentable.

Le projet
Les histoires
Note d'intention
La mise en scène
Le dispositif
Extrait

  • Le projet

Anatole Felde & Gzion a bénéficié d'une résidence de 15 jours à Théâtre Ouvert – CDN de la création. Un chantier résultant de cette première période de répétitions a fait l'objet d'une présentation publique, dans le cadre des travaux de fin d'étude des élèves du DESS "mise en scène et dramaturgie", au Théâtre B. M. Koltès de l'Université Paris-10 Nanterre. Utopia. 93, “lieu occupé” à Montreuil, a, par la suite, accueilli le projet pour un second cycle de répétitions.

Une nouvelle étape de travail – une esquisse de mise en scène – a été présentée, dans le cadre du Festival “Archipel 118”, à la MC93 – Bobigny, les 27 et 28 septembre 2006...

  • Les histoires

Anatole Felde (petit drame bural)
Mr Felde est un employé de bureau insatisfait. Il ressasse sans cesse son désir de départ, puis s'exécute, par pendaison. Cette fin brutale bouscule les règles patiemment établies, qui garantissaient le bon fonctionnement du travail au sein de l’entreprise. Ses deux collègues refusent d’envisager son remplacement et vont ainsi faire, à travers la fréquentation de la mort, l’expérience troublante de la création.

Gzion (drame spatial)
Trois cosmonautes dérivent dans l’espace. Leurs réserves vitales déclinent inexorablement. En dignes héros de la conquête spatiale, ils envisagent cette situation désespérée avec détachement et humour. Mais pas au point de franchir les limites d’un certain bon goût, qui ne saurait supporter le port, grotesque et suspect d'un costume d’ours.

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  • Note d'intention

Farces modernes, drames burlesques, ou comédies noires... ces deux courtes pièces, au ton original et drôle, à la mécanique redoutable, se jouent des appellations, des codes et des limites supposées du représentable. Pourtant, la question de la représentation est placée ici, chaque fois, au centre de l'action.

Anatole Felde peut se lire comme une métaphore de l’invention du Théâtre. On y découvre trois obscurs employés, emportés dans une lutte à mort contre la routine de la vie de bureau : en manipulant le cadavre de leur collègue, comme on manipulerait une marionnette, ils font la découverte du caractère essentiel –
à la fois subversif et métaphysique – du geste artistique.

Dans Gzion, trois cosmonautes repoussent par le jeu l'angoisse de leur fin annoncée. Perdus dans l’espace, sans espoir de secours, ils inventent, pour conjurer leur peur, des scénettes dialoguées parodiant les stéréotypes de comportement des héros de la conquête spatiale. Lorsque l’un d’entre eux apparaît revêtu d’un costume d’ours, la limite entre fiction et réalité se brouille.

Le pas de l’absurde est franchi. Toutes les options deviennent envisageables. Dont celle qui consisterait à éliminer physiquement cet ours, puisque sa simple présence nuit gravement à la respectabilité due à leur uniforme et à leur mission. Les trois cosmonautes, comme les deux collègues d’Anatole Felde, sont saisis par l’irréversibilité du jeu, qui est, par essence, « à la vie à la mort ».

C’est ce principe de bascule dans le champ du ludisme et de l'invention comme ultime proposition (mais non pas solution) pour appréhender la réalité, qui fonde ma décision de monter Anatole Felde et Gzion sous la forme d'un diptyque cohérent.

Une autre problématique rapproche ces deux textes. Il y est chaque fois question d’univers clos, confinés (la structure interne d’une entreprise, la capsule spatiale) dans lesquels l’assujettissement aux lois collectives est décrit comme une entrave à l’expression et à l’épanouissement de l’intime.

Les différents personnages n’y combattent aucune aliénation globale en conscience. Ils se trouvent confrontés, à travers l’irruption de situations paradoxales et dramatiques, à l’exploration d’un autre champ de perception. Ils sont saisis, à leur insu, de la nécessité de reconsidérer radicalement leur point de vue et d’inventer de nouvelles règles.

Anatole Felde et Gzion s’acquittent ainsi de ce qui est pour moi une des fonctions essentielles du Théâtre : développer une critique des temps actuels, une satire de nos moeurs et de nos certitudes, une réflexion sur le rapport entre la société et l’intime.

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  • La mise en scène

Hervé Blutsch puise dans diverses traditions, formes et registres de théâtre, pour s’interroger avec humour sur son origine, sa fonction et sa modernité. Il sait également ne pas oublier que celui-ci construit sa vérité sur des artifices, des conventions et des règles complexes. En suivant cette direction, le travail tentera de s’inspirer des différentes techniques d’interprétation qui permettent une mise à distance formelle, une stylisation, du réel (clown, théâtre gestuel ou d’objet, marionnette, jeu masqué...).

Il s’agira de rechercher du côté de la tradition du théâtre populaire pour tenter de transmettre au mieux cette écriture d’aujourd’hui. Il sera par exemple question de faire exister fugitivement dans le fil du récit quelques apparitions, muettes ou musicales, très courtes, des pantomimes créées par les deux collègues d'Anatole Felde. Cet arrachement progressif de la monotonie dans les vies de Mount et Posteux – ce passage du gris à la couleur – autorisera de puiser dans l'imaginaire commun légué par les grandes oeuvres du cinéma (des Temps Modernes à 2001, l'Odyssée de l'Espace...).

Gzion pourra alors sembler un prolongement de ses séquences - leur pièce S.F. en somme - ou une improbable suite, une variation sur le même thème, une contamination à un autre secteur d'activité...

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  • Le dispositif

Dans le sens de la recherche formelle, il apparaît comme primordial de penser le décor en référence aux techniques d'interprétation convoquées. Le dispositif scénique se devra donc d'être le plus simple et le plus stylisé possible, afin qu'il laisse toute sa place à la suggestion, alimentée par une interprétation assumée et des codes de jeu clairs. C'est dans un espace épuré, « décalé », mais pourtant régenté par des règles lisibles que la fable pourra se développer idéalement.

Dans Anatole Felde, Mount et Posteux recréent un Théâtre à l'aide des éléments pris sur leur lieu de travail. Le mobilier se transforme en espace de représentation : un bureau-tréteaux donc, d'apparence commun, agrémenté d'un ventilateur et de quelques accessoires (tampons, crayons, feuilles de papier...) détournés de leur fonction première. Gzion marque une progression notable dans l'élaboration des spectacles de réelle qualité composés par les deux employés. L'image filmée y fait son apparition, diffusée sur la surface modulable du bureau, elle ponctue l'action sous la forme de petites séquences d'animation dialoguées.

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  • Extrait

« Je me levais le matin et je partais au travail avec conviction ; je rentrais chez moi le soir, je dînais, je dormais et je croyais que j'étais heureux. Je n'avais aucune conscience du non-sens de ma vie, jusqu'à ce jour, où, par un beau matin de juillet, Monsieur Felde nous avait montré la voie. Ce qu'il avait réveillé en nous, tout l'or de la terre ne saurait jamais le remplacer. Une lumière brillait à l'intérieur, une force créatrice nous animait, chaque jour était une nouvelle invention, un feu d'artifice aux mille couleurs... ».

Mr Posteux, Anatole Felde

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Spectacle terminé depuis le vendredi 14 décembre 2007

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