Notes d'intentions
Samuel Dashiell Hammett
Extrait
"Il comprit alors que la mort frappait les hommes comme ça, au hasard, et que ceux-ci continuaient à vivre tant que le sort les épargnait." - S.D.H.
Avec Dashiell est né d'une commande que j'ai faite à Martine Drai. Afin d’éviter de considérer un texte de théâtre comme un objet littéraire soumis à une appréciation et à un choix, j’ai conclu un accord avec un auteur. Nous nous sommes entendues sur l’argument, les thèmes, le traitement. Je me suis engagée à mettre en scène une pièce qui n’existait pas encore. Ensuite, nous avons laissé faire les hasards, les résonances, l’actualité. Cette pièce est le fruit de la confiance et du hasard.
Martine Drai est arrivée à New York le 6 septembre 2001 pour écrire Avec Dashiell. L'actualité, les événements ont fait intrusion dans l’écriture…
"La vérité devient lentement visible à travers la forme du mensonge"- S. D. H.
Des individus ordinaires ont construit leur vie sur un modèle : l'auteur de romans policiers Samuel Dashiell Hammett, un rêve américain. Ils partent à la recherche de ses traces. Ils arrivent à New York le 6 septembre 2001. Du modèle il ne reste plus rien qu'un mirage. Les événements tragiques du 11 septembre 2001 font intrusion dans la banalité de leur vie quotidienne et suspendent le cours de l'histoire.
Avec Dashiell est le récit de ce qui arrive, de ce qui est en train d'arriver. C'est un scénario meurtrier conté sur le vif. Les attentats du 11 septembre 2001 à New York y sont vécus à travers le prisme de la vie quotidienne et intime de quatre individus ordinaires.
Avec Dashiell raconte la surveillance des anonymes à leur insu, la manipulation de ces individus par le récit des événements, manipulation en mode mineur et majeur. Avec Dashiell évoque les disparus, Samuel Dashiell Hammett mais aussi les disparus du 11 septembre.
Se construire sur un modèle c'est déjà perdre son libre arbitre.
Dans ce théâtre récit, une machination est en marche. Ces individus ordinaires sont surveillés dans leurs agissements. Ils sont manipulés par le récit de ce qui leur arrive. Ce récit capture leur intimité, diffère leur vie et opère leur victimisation. De victimes incapables d'agir, ils se transforment en manipulateurs de leurs proches.
Comment ces anonymes, en prise avec leur petite intimité traitent-ils avec le monde ?
Comment, dans le miroir brisé, discernent-ils leur modèle américain ?
27 mai 1894 - 10 janvier 1961
1915, détective à l'Agence Pinkerton. 1918, il est enrolé dans l'armée.1922, il débute sa carrière d'écrivain. 1927, il assure la critique de romans policiers au Saturday Evening Post.
1931, scénariste à succès, il écrit pour la Warner Brother, il est sous contrat chez MGM.
1937, militant politique lié à l'extrême gauche américaine, il contribue au fond de soutien aux républicains pendant la guerre d'Espagne.
1942, actif politiquement, il s'engage dans l'armée américaine.
1946, président du Civil Rights Congress de New York. Son rôle : défendre les droits des travailleurs, protester contre le lynchage des noirs, défendre la liberté de parole et d'expression politique. Le soir, il enseigne l'écriture du roman policier à la Jefferson School of Social Science, université marxiste.
1947, la commission des activités anti-américaines du sénateur Mac Carthy poursuit la présence communiste à Hollywood. La liste noire, grâce à laquelle des employeurs refusent d'engager des individus soupçonnés d'être communistes, affecte Hammett en premier lieu.
1951, interrogé par les tribunaux, le silence qu'il oppose le condamne à 6 mois de prison.
1961, il meurt ruiné au Lennox Hill Hospital.
“Michel. ...Si nous observons un peu ce que nous avons fait jusqu’à présent : avant-hier, nous sommes allés chercher le numéro soixante de la cinquante-quatrième rue, parce qu’il y a vécu en trente et un, parce que c’était sa première arrivée à New York, parce qu’il y a été pauvre avant d’y être riche.... Mais arrivés au niveau de ce qui aurait dû être le soixante, nous somme tombés sur cette espèce de complexe hôtelier de type Hilton ou Sheraton ou je ne sais quoi, on a vu qu’un escalator conduisait à autre chose, on est montés, on a trouvé ce Quatorzième Symposium sur le Métabolisme des Lipides, Agathe a eu envie de pisser, elle a cherché les toilettes, elle les a trouvées, pendant qu'elle y était on a regardé toi et moi la foule qui se pressait au Quatorzième Symposium sur le Métabolisme des Lipides, Agathe est revenue des toilettes, elle a dit qu'elles étaient éblouissantes, on est allés les voir, elles l'étaient, c'était très bien, parfait. Rien de lui dans tout ça mais on n'allait pas en faire une maladie, en soixante-dix ans la ville a changé, n'importe quelle ville, en soixante-dix ans, change, on s'y attendait, on le savait… Et donc de là on a filé jusqu'à la cinquante-deuxième rue, direction le numéro vingt-et-un, parce qu'on a lu un jour qu'au " 2I ", le club du même nom, il avait pris, une nuit, avec Faulkner, une cuite mémorable. Bien. On a trouvé, au vingt-et-un, le " 21 ", le Club n'a pas changé de nom - mais c'est devenu un Jockey Club. Fermé. Et qui ne rouvrira que fin Septembre, c'est-à-dire quand on sera partis. On n'en a pas fait de maladie... Et hier matin, on est redescendus chercher le numéro 133, East, de la 33e rue. Mais là, le numéro 133 avait purement et simplement disparu. On passe du 111 au 147. Pas de problème, au 147 il y a un portier, on se dit qu'il sait peut-être quelque chose, on demande comme on peut dans notre mauvais anglais, le portier nous dit : pas de 133, ça n'existe pas.
Agathe - Il n'a pas dit : ça n'existe pas, il a dit : ça n'existe plus. Ça n'existe plus, c'est à cause de la reconstruction, des numéros ont disparu, ne cherchez pas, ça n'existe plus...”
16, rue Marcelin Berthelot 94140 Alfortville
Voiture : périphérique Porte de Bercy / autoroute A4 direction Metz-Nancy sortie Alfortville.