Léo Ferré : « vous savez ce qu’on est tous les trois ? »
G. Brassens : « des pauvres connards devant des pieds de micro »…
Rencontre mythique
Extrait
Note d’intention
La presse
« …pourquoi est ce que j’ai eu envie de faire cette rencontre, heu, une rencontre au sommet de, de, de trois grands chanteurs français quand même… c’est parce à mon avis 1969, risque quand même d’être une année Brassens Brel Ferré, si l’on veut respecter l’ordre alphabétique. Parce que Brassens d’abord sort d’une maladie qui le tenaille depuis deux ans, on le revoit un peu maintenant à la télévision, on le réentend à la radio et en octobre prochain, vous vous installer pour trois mois à Bobino. Jacques Brel d’autre part, parce qu’il est en train d’abattre un préjugé, un moulin de plus, celui de l’impossibilité pour une comédie musicale d’avoir du succès en France et je crois que l’Homme de la Mancha est en train de le prouver. Et enfin Léo Ferré, parce qu’il vient de s’installer pour un mois à Bobino. Heu, et d’ailleurs il a tellement de choses à dire et à chanter depuis le joli mois de mai (68) qu’il assumera lui-même, les deux parties du programme. Donc pour toutes ces raisons, je vous ai rassemblé et la première question que j’ai envie de vous poser, c’est heu… si vous êtes conscients du fait que vous représentez tous les trois, les trois grands, les trois plus grands poètes, les trois plus grands auteurs-compositeurs-interprètes de la chanson française et ceci depuis des années et avec le même succès ? Non ? »
GB : « c’est très emmerdant, cette histoire d’argent, parce qu’il y a beaucoup de types qui se lancent dans la chanson pour ça.
JB : uniquement pour ça, oui.
GB : nous, on était très content de gagner notre vie avec nos petites chansonnettes, c’est une affaire entendue. Mais on n’a pas fait ça dans cette intention, on a fait ça parce que ça nous plaisait. Ça ne nous rapporterait rien, qu’on le ferait quand même. Mais depuis quelques années, justement, on entend parler que de cachets mirifiques. Il y a des tas de types qui se lancent dans cette aventure et qui se cassent les dents, à cause de ça.
JB : parce qu’ils en font une aventure financière. »…
Mettre en scène l’interview de ces trois immortels est un projet qui me tient à cœur depuis très longtemps.
A l’heure où nombre de chanteurs ne sont plus que des produits marketing ciblés, et où peu importent leur voix, les textes ou leur humanité, il est important de retrouver la chanson comme un véritable véhicule d’émotion. La voix, la diction, et surtout les paroles doivent faire partie des fondamentaux de la vie d’une chanson. Les reprises récentes de classiques façon Télé, portées par de grands noms n’ont jamais enrichi le paysage de la chanson française. Ces noms là ne servent que de caution à l’audience. On en a oublié la teneur.
Où sont passés aujourd’hui, l’engagement et les prises de positions ? Où est passé le charisme, la présence d’un Brel sur scène ? Où est passé l’humain qui fait vivre son texte ? Où est passés la voix défaillante de trac d’un Brassens et le regard perdu et fou d’un Ferré qui part avec sa chanson ? Ils étaient des artistes au premier sens du terme, au seul sens du terme. Artistes revendicateurs avec des convictions parfois atténuées par une pincée de second degré, en marge de la société, ne vivant que pour leur art. Peureux, susceptibles, sensibles, pudiques, ne faisant passer leurs sentiments que par les paroles qu’ils écrivaient.
On les dit poètes. Ils réfutent ce terme. Car pour eux, écrire une chanson avec leur cœur et leurs idées, c’est normal. Et naturel. Et ils ont raison. Etre artiste, c’est savoir défendre son opinion, c’est savoir quelles raisons nous poussent à faire ce métier, souvent des raisons "irrationnelles", c’est avoir des convictions indéfendables. C’est savoir, au fond, que de toute façon, on ira de l’autre côté du mur. Et c’est valable au théâtre comme dans la chanson. Etre artiste, c’est accepter de se donner aux autres, c’est un sacerdoce. On consacre sa vie pour ça, sans attendre de gloire ou de renommée, inconsciemment, sans le vouloir finalement car on ne peut pas, on ne sait pas faire autre chose. Etre artiste n’est pas un commerce. On ne devient pas chanteur ou comédien. On naît.
On le sait, enfant et on se doit de défendre nos opinions, nos envies. C’est ce qui transparaît sur leur visage quand ils chantent, qui se lit sur leurs traits quand ils parlent, et non, le nombre d’heures et de cachets qu’ils auront à la fin de leurs tours de chants.
Leur interview est toujours d’actualité. Ils discutent des mêmes faits qui subsistent encore aujourd’hui. Presque 40 ans… La seule différence que je noterais, serait que les journalistes d’alors étaient peut-être, beaucoup plus engagés eux-mêmes qu’ils ne le sont aujourd’hui. Les sujets d’alors n’étaient pas toujours conformes aux présupposés politiquement corrects. On ne se perdait pas en délibération people, on posait de vraies questions et on exigeait de vraies réponses. Il faut croire que les débats avaient plus de consistance.
Il est probable que les dénicheurs de ragots n’y trouveront pas leur compte. Car cette pièce n’est pas une délibération sur la vie cachée de ces trois grands noms que sont, Brassens Brel et Ferré, mais une charge d’âme, une simplicité authentique et spontanée, une intimité soutenue et simple. Car il faut bien le dire, « chez ces gens là, on vit. »
En dernier point, cette pièce est un hommage. Pour les faire revivre, l’espace d’un moment que nous donne la magie du théâtre, pour leur génération, la mienne et celle à venir.
Si je devais faire une analogie, je me permettrais la comparaison avec une journée du patrimoine. Cette pièce est une entrée vers des monuments dont nous connaissons tous certains traits sans jamais s’être véritablement penchés dessus pour y déceler les fondations d’un avenir. On n’oublie pas les artistes. Il faut espérer que leurs traces restent notre avenir.
Aurore Ly
« (…) ils ont fait un triomphe à Avignon l’an passé, c’était l’un des grands évènement du Festival. C’est une idée magistrale. Le faire avec autant de talent que ces trois là, je ne suis pas sur que ce soit donné à tout le monde. Ce n’est pas fait de façon caricatural et c’est fait avec sensibilité, avec l’âme d’Aurore LY qui est le metteur en scène et c’est fait avec beaucoup de talent. (…) » Frédéric Zeitoun, France 2, le 10 juin 2008
« Je voudrais finalement rétablir la justice ici même. (…) J’ai découvert qu’il y avait trois comédiens qui avaient été les premiers à monter ça sur scène, mais ce sont des petits comédiens, c’est un petit théâtre donc on en parle moins, donc je voudrais leur rendre hommage : Brassens, brel, Ferré ou l’Interview. » Gérard Miller, Europe 1, 6 juin 2008
.« …une façon originale de découvrir leur conception de l’art, de la chanson, de l’anarchie, de la religion et de la femme. » Amélie Foucault, Matin Plus, le 13 mars 2007
« …c’était très, très bien, je dirais même parfait. On s’y serait cru ! Le tout était d’une justesse incroyable avec toutes les attitudes et mimiques des personnages. Quelle maîtrise du sujet ! » Gilberte Mode-Saunier, Pays briard, 20 avril 2007
« …Comme la vraie, mieux que la vraie ? On se souvient de ce coup médiatique que fut l’interview donnée ensemble par Brel, Brassens et Ferré à la radio en 1969. On a en mémoire la fameuse photo du trio autour de la table, et le nuage de fumée autour d’eux qui les rend encore plus irréels. … Aurore Ly se tire remarquablement de l’aventure périlleuse consistant à « ressusciter », sans les récupérer ni les trahir, des personnages singuliers que nous avons tant aimés. Et c’est un bonheur… » Marie Ordinis, Les 3 Coups, 14 mars 2007
« … La mise sur scène, et en scène, de cette interview par la jeune comédienne et metteur en scène, Aurore Ly, est une belle réussite car elle parvient à redonner vie à ceux qui sont devenus des mythes et à évoquer leur mémoire sans en faire des caricatures ni dénaturer le matériau pour le théâtraliser. Les trois comédiens, Erwan Courtioux, Alain Pretin et Alain Lagneau, dont le physique présente une certaine ressemblance avec ceux qui se définissaient comme de petits artisans de la chanson, sont époustouflants et portent le texte avec une telle spontanéité que le spectacle est terriblement vivant, jubilatoire et émouvant dans ce qu’il révèle ou du moins éclaire la réalité quotidienne, presque intime, de ces trois hommes… » M.M, Froggy delight, mai 2008
41, rue du Temple 75004 Paris