Dans les années 1930 en Angleterre, un groupe de mineurs suit des cours d'histoire de l'art. Abandonnant bien vite la théorie pour passer à la pratique, ils voient leurs travaux remarqués par une riche collectionneuse. Lee Hall, scénariste de Billy Elliot, raconte cette improbable – mais authentique ! - découverte du monde de l'art et dresse de ces hommes des portraits touchants, inattendus et drôles.
Dans le plus pur ton de la comédie sociale anglaise, il évoque la singulière trajectoire de ces « peintres au charbon » qui, se défiant d'abord de ce que l'on appelle le bon goût, se révèleront capables d'une introspection qu'ils ne soupçonnaient pas. Leur révélation d'un autre monde possible et de ce que peut apporter l'art est accompagnée de savoureuses et cocasses péripéties, ainsi que de moments plus intimes et émouvants.
Le metteur en scène Marion Bierry réunit huit comédiens suisses et français pour cette première francophone d'une pièce qui a déjà remporté un grand succès en Grande-Bretagne et en Autriche et qui vient d’être créée à Broadway.
Lee Hall ne fait pas parler des gens, vous ou moi, il fait parler le peuple - non les masses ou les victimes (même atteintes de tétraplégie comme dans La Cuisine d'Elvis ou de cancer comme dans Face de cuillère Steinberg) - il fait parler le peuple dans sa dignité d'acteur du genre humain : des pâtissiers, desprofesseurs, des artistes, des mineurs de fond, des amateurs d'art, vous et moi.
Quand Voltaire écrivait que " le théâtre instruit mieux qu'un gros livre " , sans doute ne pensait-il pas à une école du spectateur mais plutôt à ce que l'émotion, tragique ou comique, reste une forge universellement accessible de la libre pensée.
Lee Hall veut être compris de tous, non décodé par quelques initiés. Ses pièces vibrent d'un engagement, de quelque chose qui veut se mettre debout. J'essaie de retrouver ce mouvement.
Étrangement au pays de Molière, de Marivaux et de Beaumarchais, l'injonction dominante place souvent lepeuple sous la loupe compatissante du sérieux avec ce regard d'anthropologue penché sur une ethnie méconnue. On rit parfois du populaire (heureusement !), mais l'on rit souvent de séquences, d'habitudes répertoriées, et le " on " de ce rire nous distingue délicieusement, nous les autres...
Il est rare aujourd'hui qu'au théâtre l'homme de la rue vive des aventures - à l'instar de Sosie, Scapin,quelque Lisette, Figaro et tant d'autres - qu'il se voie conférer un destin, une trajectoire où l'expérience va dégager un questionnement métaphysique, une émancipation morale, politique, susceptibles d'apporter un témoignage universel.
Dans le cadre d’un cours de « sensibilisation artistique », les mineurs de Lee Hall se commentent eux-mêmes avec humour et passion. Eux qui " n'avaient jamais vu de tableau en vrai " vont peu à peu soutenir la controverse avec leur maître.
Marion Bierry
45 rue Richard Lenoir 75011 Paris