Médée-Matériau

Paris 6e
du 14 octobre au 18 novembre 2007
35 minutes

Médée-Matériau

Médée-Matériau est, certes, une réécriture du mythe grec, mais la pièce en est avant tout sa continuation, sa résonance, son éternel fin et recommencement. La parole de Médée résonne comme un écho dans un trou noir et chaque vers construit, remplit et déchire son propre espace.
  • Le mythe et la pièce

Médée-Matériau est, certes, une réécriture du mythe grec, mais la pièce en est avant tout sa continuation, sa résonance, son éternel fin et recommencement. La parole de Médée résonne comme un écho dans un trou noir et chaque vers construit, remplit et déchire son propre espace.

Médée est une femme de la terre, une magicienne, une non-civilisée, qui a trahi sa patrie et tué son frère par amour pour Jason. Elle devient alors une épouse, une mère et une exilée. Lorsqu’elle apprend, ou plutôt se rend compte par elle-même, que Jason la quitte pour épouser la fille du roi de Corinthe, sa parole explose. Son passé de traîtresse lui saute aux yeux, son repentir la ronge, sa rage calcule comment punir son mari ; c’est l’accouchement du monstre. Apparaît alors une créature entre le dieu et l’animal, ni homme ni femme, qui ne veut laisser aucune trace de la « trahison » derrière elle. Ainsi, elle tue ses enfants par vengeance, mais aussi pour leur éviter la honte d’un nouvel exil.

  • Scénographie et jeu

Le temps de la parole est long. Au début, ce sont des sons, des cris que l’ont entend. Puis, pendant que  l’actrice se prépare à jouer, comme une petite fille qui installe ses jouets, trois voix off s’interrogent sur l’acteur, autant sur le jeu que sur sa condition.

L’actrice entend ces voix, mais se concentre plus à restituer le mythe de Jason et Médée par des images.

La première est celle de l’exil de la barbare, qui apparaît sur scène avec un sac en jute, dans lequel se trouvent tous ses  « souvenirs ».

Elle en sort tout d’abord une cothurne, une seule, car c’est avec un pied nu que Jason s’est présenté devant son oncle Pélias, qui le défia de lui rapporter la toison d’or.

Demande fatale pour Médée.

Dans le film Médée de Pier Paolo Pasolini, le chant des femmes de Colchide annonce l’arrivée d’un mystérieux navigateur, et Médée y pressent déjà sa perte et sa trahison future.

L’actrice sort ensuite de son sac une mini-piscine, couleur rouge rose dans laquelle elle souffle alors que la voix off différencie les méthodes de jeu selon Brecht et Stanislavski. Cette bouée en plastic constitue dans la mémoire collective une succession d’images comme celle du placenta par sa couleur, d’une auge par sa forme, ou encore d’un bassin à baptême par son usage. En effet, les enfants de Médée (représentés par des bébés en plastic) y baigneront pendant toute la durée du spectacle.

Puis la bande-son s’arrête, et surgit un autre épisode de la vie de Médée : celui du fratricide et de la trahison envers sa patrie. Une scène silencieuse où l’actrice se lave les mains.

C’est alors que les voix enregistrées de la nourrice et de Jason retentissent, suggérant à la fois leur disparition et leur présence dans la mémoire de Médée. On pénètre alors les pensées de l’héroïne sans avoir pourtant notion du temps ou de l’espace.

Commence alors son monologue de femme blessée, disloquée, jouant « sur des braises », s’adressant tour à tour à son époux et à ses enfants. C’est un corps vrillé qui s’exprime, qu’on peut associer aux dessins d’Egon Schiele.

Mais lorsque surgit dans son esprit, la vengeance, remède à son malheur, qui dans un premier temps est de brûler sa rivale en lui offrant « la robe de mariée de la barbare », sa folie la fait tenir debout, ses membres s’allongent en même temps que les ruses fusent dans sa tête. C’est la barbare qui prend le dessus sur la femme qu’on a tenté de civiliser, en l’éloignant du sacré, sa religion. Elle invoque alors le soleil, son aïeul et ses pouvoirs « magiques » résultent des blessures d’épouse abandonnée, de traîtresse et de meurtrière.

Les matériaux utilisés pour la scénographie font allusion aussi bien au mythe ancien qu’à sa réécriture. Ce sont des objets-matières de la vie courante, mais auxquels l’actrice donne une dimension plus vaste. Comme si aucun d’eux n’avait l’identité/fonction qu’on leur attribue. Et c’est ce même mystère que dissimulent les mots.

La fureur de Médée passe par différents états : la chienne rampante du début fait place à la magicienne monstrueuse et infanticide qu’elle décide d’être. Sa vengeance atteint alors son paroxysme.

Un réel désir de mettre fin à tout « c’est aujourd’hui l’échéance Jason ». Médée donne ainsi naissance à la fin de son amour, de sa lignée et de sa trahison. La catharsis s’est produite. Tout redevient silence  « les cris de la Colchide aussi se sont tuent », tout demeure dans le vide.

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Spectacle terminé depuis le dimanche 18 novembre 2007

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