Mère Courage et ses enfants

du 4 au 20 juillet 2008

Mère Courage et ses enfants

Très belle mise en scène et grand succès public et critique pour cette œuvre emblématique de Brecht retraçant la traversée inexorable et obstinée de la Guerre de Trente ans par l'étrange convoi de la cantinière Anna Fierling.

"Je ne suis certes pas opposé à ce que, au théâtre, la réalité se pare d’un bel éclat. Mais ni les acteurs ni les spectateurs ne devraient oublier que cet enchantement et cet éclat magique doivent servir à dévoiler et à éclairer la réalité du monde." Bertolt Brecht (Propos rapportés par Ernst Schumacher dans Er wird bleiben in Neue deutsche Literatur, oct 1956)

Mais qu’est-ce qui fait donc marcher Courage ?
Comment monter Mère Courage aujourd’hui ?
Contexte historique
La presse

  • Mais qu’est-ce qui fait donc marcher Courage ?

Malgré la guerre, malgré l’horreur, malgré la mort de ses enfants, elle avance. La carriole avance. Vendre ses marchandises, c’est gagner trois sous, et gagner trois sous, c’est pouvoir manger. Pouvoir survivre et parvenir à exister envers et contre tout. Ce qui la fait marcher malgré tout, c’est l’instinct de vie. Un formidable instinct de vie qui la fait aller de l’avant avec obstination. Mais de même que Charlot est aveuglé par la faim, Courage est aveuglée par sa détermination à vivre.

Elle ne peut accéder à la connaissance des grandes causes politiques et des stratégies militaires, mais ce qu’elle sait, depuis toujours, c’est qu’il ne faut compter sur l’aide de personne et surtout pas des « puissants ». Elle croit qu’il lui faut s’en sortir toute seule. Rester en vie et nourrir ses trois enfants : réussir cela, avec pour seules armes, sa vaillance, son humour, sa ruse, et sa prudence. C’est sa façon de résister et elle a cru pouvoir être gagnante.

Mais Courage est au cœur des contradictions : elle maudit la guerre quand sa fille est défigurée, chante ses louanges à la scène suivante. C’est qu’elle croit à la fatalité de la guerre. Elle n’imagine pas d’autre possibilité que d’y faire son trou sans comprendre que c’est son trou qu’elle creuse. Bien sûr elle est aveugle, elle ne comprend pas qu’elle participe à cette guerre qui va les broyer, elle et ses enfants. Mais si elle ne le voit pas, nous spectateurs, nous le voyons.

Brecht désigne la contradiction. Pour lui, on le sait « c’est à l’œuvre de poser les questions, au public de trouver les réponses. » Dans la pièce, la guerre joue comme un verre grossissant qui révèle l’opposition fondamentale entre les grands de ce monde et les pauvres gens. Dans ses mises en scène, Brecht a fait de Courage une héroïne problématique, voire négative : pour lui, elle n’a rien compris au fonctionnement du monde.

Mais n’y a-t-il pas place désormais pour une autre série d’interrogations : Qu’aurait-elle pu comprendre ? A-t-elle rencontré à un seul moment la possibilité d’envisager sa survie autrement qu’individuellement ? Peut-on condamner ce courage du pauvre et de l’opprimé dans sa volonté de s’en sortir à tout prix ? Quelles seraient les solutions pour qu’elle et ses enfants puissent réellement vivre ?

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  • Comment monter Mère Courage aujourd’hui ?

• Prendre le théâtre de Brecht comme un théâtre de questionnement, un théâtre de la conscience qui n’impose aucune réponse, refuse la linéarité des causes et des effets et choisit la rupture. « Mon théâtre n’a pas d’autre sens que l’organisation du scandale » disait Brecht à des étudiants de Leipzig.
• Garder une historicité générale sans ramener la pièce à des données historiques précises.
• Rompre avec une pseudo-orthodoxie brechtienne pour s’autoriser la subjectivité.
• Garder une distance qui permet la critique sans négliger le désir d’un partage avec ce qui se passe sur la scène.
• C’est dans les tensions, les questionnements de la pièce qu’il faut se glisser aujourd’hui et non se reposer sur l’héritage brechtien.
• Trouver à travers lui notre propre chemin et préserver vis à vis de lui, notre liberté comme il a su préserver la sienne vis à vis de son propre héritage culturel.

"Le théâtre de Brecht est fait pour émouvoir, pour enseigner, pour réjouir et par conséquent pour être joué." (Roland Barthes in Théâtre Populaire mars 1957)

Anne-Marie Lazarini

"Pour les pauvres il n’y a pas d’assurance sur la vie. Ce qui veut dire que d’une manière ou d’une autre, ça leur tombe dessus. Ceux sur qui ça tombe, c’est ceux-là qu’on appelle les pauvres. Ces pauvres, aucune prudence ne peut les sauver." Brecht. Les fusils de la Mère Carrar

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  • Contexte historique

Brecht écrit Mère Courage et ses enfants en 1938, alors que la montée du nazisme l’a contraint à quitter son pays. Le spectre de la guerre plane alors sur toute l’Europe et lorsque la pièce est créée en 1941 on est en plein cœur du conflit. Brecht choisira pourtant d’inscrire son histoire dans le cadre d’une autre guerre, particulièrement cruelle, dont l’Allemagne a été le principal théâtre et la première victime puisqu’elle n’y perdra pas moins d’un tiers de sa population : la Guerre de Trente ans (1618-1648). C’est la vagabonde Courage, un personnage populaire de la littérature allemande qui donnera son nom à Anna Fierling et inspirera la traversée inexorable de cette cantinière, lancée avec ses enfants et ses biens au cœur des champs de bataille, passant, au gré du commerce, des armées catholiques aux armées protestantes, et qui, s’accrochant à ses marchandises, perdra un à un ses enfants.

A travers cette pièce, en imposant à la fable cette distance historique, Brecht affine sa théorie du Théâtre Epique et affirme sa volonté d’aiguiser le regard et le jugement de ses contemporains.

En 1954, c’est à travers Mère Courage et ses enfants que la France, lors du premier Festival International du Théâtre de Paris, découvre le Berliner Ensemble et redécouvre Brecht : les grandes personnalités du théâtre français sont là qui resteront marquées par cette expérience et par l’interprétation magistrale de Hélène Weigel dans le rôle de Anna Fierling.

Roland Barthes écrit dans France-Observateur du 8 juillet 1954 sous le titre Admirables représentations de Mutter Courage par le Berliner Ensemble :
"Dans Mère Courage, la fatalité est sur la scène, la liberté est dans la salle, et le rôle de la dramaturgie, c’est bien de couper l’une de l’autre. Mère Courage, elle, est dans la fatalité, elle croit que la guerre est inévitable, nécessaire à son commerce, à sa vie, elle n’en fait même pas question. Mais ceci posé devant nous se passe hors de nous. Et au moment même où ce recul nous est donné, nous voyons, nous savons que la guerre n’est pas fatale : nous le savons, non par l’effet d’une prédication ou d’une démonstration, mais par cette espèce d’évidence viscérale qui naît de la confrontation du regardant et du regardé, et qui est la fonction constitutive du théâtre.
C’est ce dédoublement de la fatalité du spectacle et de la liberté du spectateur qui constitue la révolution théâtrale de Brecht.
Un nouveau style est né, celui d’une pure narration, où le spectateur lui-même apporte la dimension de sa liberté : il comprend qu’il a lui aussi ses innombrables guerres de Trente Ans, qu’il y est, comme Mère Courage, aveugle, conscient de perdre à chaque bataille un peu plus de ce qu’il aime ; mais il comprend aussi qu’il lui suffit de voir cette fatalité pour qu’il ne reste plus d’elle qu’un malheur remédiable."

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  • La presse

"Comment se lasserait-on d'un tel chef-d'œuvre ? La version d'Anne-Marie Lazarini est d'une parfaite lisibilité." J. Nerson, Le Nouvel Observateur

"Dans une blancheur épurée, un voyage sans fin au bout de l'inhumanité. La guerre que l'on croyait parenthèse exceptionnelle, est devenue l'ordre naturel du monde." D. Méreuze, La Croix

"Degré zéro de la conscience humaine, Mère Courage ? Ferment de vie au contraire... A.-M. Lazarini fait entendre le texte critique de Brecht et ses violentes ambiguïtés. Une blancheur immaculée pour exprimer le monde du sang. C'est poignant." F. Pascaud ,Télérama Sortir

"Oeuvre belle mais âpre, la musique de Paul Dessau est puissante et ardue. La troupe joue avec un engagement de tout l'être et une belle homogénéité de jeu. La traduction de B. Besson et de G. Serreau est toujours efficace et belle. L'excellente comédienne Sylvie Herbert a su trouver la rudesse de la femme des champs de bataille." A. Héliot, Le Quotidien du Médecin

"La mise en scène rend la pièce plus forte encore. Moderne, elle suscite la réflexion en laissant la parole à l'auteur et aux personnages. L'héroïne nous est livrée dans sa chair, avec sa force et ses contradictions. Un personnage incarné par une comédienne littéralement habitée. Sylvie Herbert, dominante et terrible, subtilement émouvante." L. de Rocquigny, Pariscope

"Spectacle porté par de brillants acteurs." D.Tordjman, Horizon Etudiant

"Libérée des dogmes, la mise en scène de Lazarini éclaire la densité humaine, et la richesse contradictoire des personnages. Dans l'espace de F. Cabanat autour d'une carriole transformable de belle facture (tout comme les costumes de D. Bourde)." J. Chollet, Actualités de la scénographie

"Tout ici est beau. La métaphore de la pièce est cette carriole à la structure et au toit léger, qui voyage inlassablement sur la scène, tirée, portée, poussée, déposée, sans cesse déménagée. Douze excellents comédiens, qui chantent remarquablement." Marie Ordinis

"La distribution est riche de talents. Sylvie Herbert a la stature d'une Courage rouée et crédule à la fois. Autour d'elle Catherine (Judith d'Aleazzo) bouleversante sacrifiée, le lieutenant (Bruno Andrieux), Eilif (David Fernandez), Petitsuisse (Hervé Fontaine), le Colonel (Claude Guedj), jeune soldat (Maximilien Neujahr), suivent la décomposition des peuples et des âmes." Danielle Dumas, Théâtres

"Dans cette mise en scène intelligente et claire la problématique n'est pas simple. Que peuvent les pauvres, dans ce monde blanc, aveuglant, qui échappe ?" F. Pascaud, Télérama

"Une Courage diablement sympathique en dépit de ses contradictions." Y. Bourgade, AFP

"La rugosité de la toile renvoie à l'âpreté des paysages de guerre, cadre de l'errance de la carriole d'Anna Fierling. Frédérique Lazarini, Michel Ouimet, Marc Schapira sont excellents." A. Héliot, Le Figaro

"La salle a longuement applaudi. Tout le monde le mérite vraiment." G. Bensaid, TJP

"La mise en scène d'A.-M. Lazarini rend les personnages profondément lumineux et humains. Sa Courage est de tous les temps, perdue en elle-même." J.-L. Pinte, Figaroscope

"A.-M. Lazarini est une formidable meneuse de troupes, assemblant les caractères d'une solide distribution. Par un jeu coloré de projections au sol, elle confère à la blancheur immaculée de la scène et des décors une force théâtrale évidente. Passionnant." L. Liban, L'Express

"Monter Brecht aujourd'hui est une délicate équation : faire résonner ce qui dans ses pièces nous parle du monde actuel exige que l'on s'affranchisse de l'orthodoxie brechtienne. Un exercice d'équilibriste. En se mesurant à Mère Courage et ses enfants, A.-M. Lazarini trouve une matière formidablement moderne." D. Roux, Rappels

"Sylvie Herbert apporte toutes les nuances d'une femme éprouvée, acharnée à la lutte quotidienne. Elle incarne une Courage de notre temps." M. Le Roux, La Quinzaine littéraire

"A.-M. Lazarini prouve que la pièce garde intacte sa puissance dramatique et surtout toute son ironique tristesse." A. Santi, La Terrasse

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Sélection d’avis du public

RE: Mère courage et ses enfants Le 17 juillet 2008 à 09h22

Je suis tout-à-fait d'accord avec vous chère Stiole. Ce spectacle mérite vraiment le déplacement. J'avoue avoir eu un peu peur : 2h 30, "c'est pas rien"... mais je ne me suis pas ennuyé une seconde, des rebondissements avec cette inteprétation de chacun des comédiens meilleurs les uns que les autres. A ne pas manquer, que du plaisir.

Mère courage et ses enfants Le 9 mars 2008 à 10h58

Un spectacle magnifique, des comédiens de grand talent, une mise en scène toute en finesse. 2h30 de théâtre à consommer sans modération.

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RE: Mère courage et ses enfants Le 17 juillet 2008 à 09h22

Je suis tout-à-fait d'accord avec vous chère Stiole. Ce spectacle mérite vraiment le déplacement. J'avoue avoir eu un peu peur : 2h 30, "c'est pas rien"... mais je ne me suis pas ennuyé une seconde, des rebondissements avec cette inteprétation de chacun des comédiens meilleurs les uns que les autres. A ne pas manquer, que du plaisir.

Mère courage et ses enfants Le 9 mars 2008 à 10h58

Un spectacle magnifique, des comédiens de grand talent, une mise en scène toute en finesse. 2h30 de théâtre à consommer sans modération.

Informations pratiques

Artistic Athévains

45 rue Richard Lenoir 75011 Paris

Accès handicapé (sous conditions) Bar Bastille Librairie/boutique Ménilmontant Restaurant Salle climatisée
  • Métro : Voltaire à 127 m
  • Bus : Gymnase Japy à 84 m, Voltaire - Léon Blum à 119 m, Faidherbe à 318 m
Calcul d'itinéraires avec Apple Plan et Google Maps

Plan d’accès

Artistic Athévains
45 rue Richard Lenoir 75011 Paris
Spectacle terminé depuis le dimanche 20 juillet 2008

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