On ne présente plus Beckett. Depuis un demi-siècle, ses personnages incarnent une certaine condition humaine, oscillation permanente entre un fol espoir et une fatale tristesse. Dans la nudité de la parole, à laquelle tend Beckett, ces êtres tragi-comiques ne cessent pourtant de parler, comme si les mots les maintenaient en vie.
Le couple de Oh les beaux jours, Winnie et Willie, est l’archétype de ce théâtre. Seuls, dans un désert humain : elle, enterrée jusqu’à la taille, entourée de quelques objets, s’enfonce au fil du temps, comme aspirée par la terre ; lui, rampe derrière, disparaît, réapparaît. Face au vertige de ce vide, face à la mort qui grignote le corps, Winnie reste debout, elle dit l’émerveillement d’être là, elle rend hommage à la beauté du jour nouveau et quand le présent soudain lui offre une surprise, aussi minuscule soit-elle dans ce quotidien presque mort, elle exulte. Jusqu’au bout elle chante, malgré tout. Elle nous livre la promesse de l’instant. Yann Collette, abolissant toute idée de travestissement, s’empare du rôle avec virtuosité : il est une Winnie à part entière, toujours étonnante.
Oh les beaux jours est une oeuvre lumineuse. Il y a dans cette pièce, dans la parole qu’y déploie Winnie, une manière d’être à la vie qui combine la plus exigeante lucidité et la plus exquise élégance devant la vieillesse et la décrépitude. Ce subtil accord est à l’origine de l’attirance que j’ai pour cette pièce. Vivre à l’endroit où écrit Beckett, à cet endroit de parole où tout est dominé par le constat de la chute inexorable, on ne saurait en dire le pourquoi. Mais la proposition que fait Winnie sur le comment, comment vivre à ce niveau de conscience, est simplement belle. La pulsion de vie de Winnie vient de la puissance de son imagination. Il y a de l’enfance dans cette poésie qui s’abstrait de la réalité et des forces naturelles, recrée un univers onirique, fait revivre les êtres du passé. La flamme du désir est maintenue à l’intérieur de l’épuisement, la force de l’espoir fait face au désenchantement du monde et c’est cette tension qu’il m’intéresse de mettre en jeu.
Blandine Savetier
« L'acteur, qui compose un personnage à la féminité exacerbée, fait littéralement corps avec cette partition. (...) À force de dépouillement dans son jeu, Yann Collette arrive à l’abstraction pure.» L'Humanité
« Une Winnie qui, aux côtés de son vieux compagnon Willie (...), cristallise à elle seule les impasses, les élévations et les ambiguïtés de la condition humaine. » La Terrasse
« Cette pièce sonne comme une hésitation permanente entre amusement et tristesse. Une opposition qui met au jour, de manière limpide, les différentes facettes du comportement humain. » La Voix du Nord
2, rue Edouard Poisson 93304 Aubervilliers
Voiture : par la Porte d'Aubervilliers ou de La Villette - puis direction Aubervilliers centre
Navette retour : le Théâtre de la Commune met à votre disposition une navette retour gratuite du mardi au samedi - dans la limite des places disponibles. Elle dessert les stations Porte de la Villette, Stalingrad, Gare de l'Est et Châtelet.