Résumé
Extrait
Présentation
La pièce
Y aurait-il ici, dans la maison, quelque chose qui ronge ? (Henrik Ibsen)
Depuis quelques années déjà, peut-être depuis l’accident dont le petit Eyolf a été la victime, Rita Allmers sent que son mari lui échappe. Allmers, tout juste rentré de voyage, lui annonce une « transformation » qui n’est pas celle qu’elle aurait pu souhaiter. Il renonce à écrire le livre sur la « responsabilité humaine » qui était l’œuvre de sa vie pour se consacrer entièrement à son fils, petit Eyolf, qu’il a le sentiment d’avoir négligé.
«Peut-être Ibsen n’a-t-il jamais autant que dans cette lutte obscure et trouble entre amour conjugal et amour maternel et paternel sondé l’abîme de la vie», écrit Claudio Magris à propos de cette œuvre curieusement méconnue parmi celles du dernier cycle d’Henrik Ibsen.
Ils habitaient tous deux, une si paisible maison
En automne et dans les frimas de l’hiver
Alors vint le feu - et la maison a disparu
Ensemble, ils doivent chercher parmi les cendres
Parce qu’au profond des cendres un joyau se dissimule
Dont l’éclat n’a pu être terni par les flammes
Et qu’ils cherchent, elle et lui, avec ferveur
L’un ou l’autre finira par le trouver
Mais qu’ils finissent par la trouver, la pierre qu’ils ont perdue
L’inaltérable joyau qu’ils chérissaient
Elle ne retrouvera jamais sa paix évanouie
Ni lui la joie qui a péri
Henrik Ibsen
texte français Michel Vittoz
Henrik Ibsen (1828-1906) écrit Petit Eyolf entre juillet et octobre 1894, où il en achève la deuxième version. Viennent ensuite les pièces, John-Gabriel Borkman (1896) et Quand nous nous réveillerons d’entre les morts (1899), qui représentent avec Petit Eyolf les trois dernières œuvres du dramaturge norvégien.
Le poème ci-dessus, écrit en 1891, faisait partie des premières esquisses rédigées pour Solness le constructeur. Ibsen ne le conserva pas pour Solness, mais il eut par la suite, avant de l’abandonner au moment de la composition finale de la pièce, l’intention de le mettre dans la bouche du personnage d’Alfred Allmers dans Petit Eyolf.
Une belle propriété au bord d’un fjord à une dizaine de kilomètres de la ville.
D’origine modeste, orphelin à 17 ans, Alfred Allmers a pu subvenir à ses besoins et à ceux de sa jeune demi-sœur Asta tout en poursuivant ses études. En épousant Rita, il a trouvé le bonheur. Il lui a été donné de vivre dans l’aisance et le luxe, de suivre sa vocation : travailler, étudier, se consacrer entièrement à son œuvre, un livre sur la « responsabilité humaine ».
Alfred et Rita ont un enfant de 9 ans, le petit Eyolf. Eyolf est resté paralysé d’une jambe à la suite d’une chute survenue quand il était bébé, il marche en s’appuyant sur une béquille.
La pièce commence tôt le matin et s’achèvera le lendemain soir au crépuscule.
Alfred est rentré de voyage plus tôt que prévu. Ses méditations au cours de longues promenades dans les montagnes, la vision du ciel, les paysages, la solitude en pleine nature, l’ont conduit à réexaminer sa vie. Pour être en accord avec lui-même, avec sa pensée, il doit renoncer à écrire le livre auquel il s’est entièrement consacré. Il ne veut plus théoriser sur la « responsabilité humaine » mais, lui-même, prendre ses responsabilités et plus particulièrement vis-à-vis de son fils qu’il a le sentiment d’avoir négligé.
Depuis quelques années déjà, peut-être depuis l’accident dont le petit Eyolf a été la victime, Rita sent que son mari lui échappe. Elle le voulait pour elle seule, il était sans cesse plongé dans son œuvre. Quand il s’en arrachait, ses confidences, son intimité semblaient se tourner davantage vers Asta, sa demi-sœur que vers elle. La « transformation » que lui annonce Alfred à son retour de voyage n’est pas celle qu’elle aurait pu souhaiter.
Une petite vieille au regard perçant, « La Demoiselle aux rats », entre et demande s’il n’y aurait pas, dans la maison, quelque chose qui ronge. Car elle a le pouvoir, elle et son chien, d’attirer tout ce qui ronge, tous les rats, et de les entraîner vers le fjord où ils se noient.
Le petit Eyolf est fasciné par « La Demoiselle aux rats ». Quand elle s’en va, il s’esquive sans se faire remarquer. Il la suit. Quand elle monte dans sa barque sur le fjord et qu’elle s’éloigne du rivage, il la suit encore. Il s’enfonce dans l’eau et disparaît.
L’eau est profonde et les courants sont violents. À la surface, il ne reste que la béquille.
La disparition du petit Eyolf laisse Alfred, Rita et Asta seuls face à eux-mêmes, face à la vérité de ce qui les « ronge ».
La traversée est rude, la vérité cruelle. Mais elle opère une « transformation » qui laisse apparaître une possibilité de vivre : faire face à la responsabilité humaine.
Michel Vittoz
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