Pulvérisés

Aubervilliers (93)
du 19 mars au 5 avril 2014
1h30

Pulvérisés

Alexandra Badea raconte la solitude, la fragilité et l’intimité de quatre vies anonymes parmi des millions que les rouages incontrôlables de la Grande Machine Financière « pulvérisent ». Une œuvre radicale qui délaisse les canons du théâtre traditionnel pour mieux éclairer la conscience de chacun sur ce qu’il est en train de vivre.
  • Dire la mondialisation

La course effrénée au profit, la folle circulation des capitaux, le dérèglement du marché financier, nous les subissons comme de mauvais rêves. Alexandra Badea raconte la solitude, la fragilité et l’intimité de quatre personnes, comme prises au hasard et étrangères les unes aux autres ; quatre vies anonymes parmi des millions que les rouages incontrôlables de la Grande Machine Financière « pulvérisent ». Une œuvre radicale qui, à la manière de Georges Perec dans L’Augmentation, délaisse les canons du théâtre traditionnel, pour mieux éclairer la conscience de chacun sur ce qu’il est en train de vivre.

« Cette étrange pièce, dès la première lecture, nous a saisis par sa force, sa rapidité, son originalité. Sa forme même nous invite à explorer une autre manière d'aborder le théâtre. Nous voulons paradoxalement faire “voir” une parole fragmentée, déchirée qui circule entre quatre “individus divisés”, cette parole lancinante en “crise” qui engourdit les têtes, qui transperce les corps. Nous ressentons la même urgence à donner à entendre cette pièce que celle qui a poussé Alexandra Badea à écrire comme on appelle une ambulance. » Aurélia Guillet et Jacques Nichet

Grand Prix de la Littérature dramatique en 2013.

  • La presse

« Deux comédiens, quatre voix et un dispositif théâtral fascinant pour décortiquer les rouages et les ravages intimes de la mondialisation. Alliance aboutie entre intelligence dramaturgique et vérité d’un jeu ultrasensible. Une bouleversante et pénétrante leçon de théâtre. » Catherine Robert, La Terrasse, 6 mars 2014

  • Note d’intention

La course effrénée au profit, la folle circulation des capitaux se ruant sur la main-d’oeuvre la moins payée, le dérèglement du marché financier multipliant les faillites d'entreprises et accroissant la dette de pays entiers, nous les subissons comme de mauvais rêves.

Alexandra Badea a donné forme à un tel cauchemar : elle raconte une journée et une nuit de quatre personnes étrangères les unes aux autres. Pourtant la « mondialisation » les relie à leur insu. Elles n'en sont que des pions. On ne connaît même pas leur nom, seulement leur différente fonction sur un organigramme, leur ville, leur sexe :
« Responsable Assurance Qualité Sous-traitance Lyon H »
« Superviseur de Plateau (Team leader) Dakar H »
« Opérateur de fabrication Shangaï F »
« Ingénieur d'études et développement Bucarest F »

L'auteur suit successivement chacun de ces inconnus, depuis leur réveil, tout au long d'une journée sans date et d'une interminable nuit. Elle les accompagne sur leurs lieux de travail et jusque dans leur chambre ou leur dortoir. Elle a choisi quatre vies anonymes parmi des millions, des millions et des millions qui se brûlent pour faire tourner la gigantesque roue de l'Économie Mondiale.

À la manière de Georges Perec dans L'Augmentation, Alexandra Badea délaisse les canons du théâtre traditionnel, la fable, la division en actes et en scènes, l'affrontement de personnages incarnés par des acteurs, costumés et maquillés… Au lieu d'écrire de brillants dialogues, l'auteure préfère s'adresser à mi-voix à ceux qu'elle vient rejoindre : elle les tutoie familièrement, leur parle en toute franchise, sans aucune pudeur. Elle dit à chacun ce qu'il est en train de vivre, de faire ou de penser, à l'instant même où elle le dit.

Ce poème narratif bascule constamment du monologue au dialogue. Une voix plurielle traverse la solitude d'un corps, entourée d'autres solitudes…

Nous nous réjouissons de pouvoir commencer à imaginer le premier « mode d'emploi » possible de ce texte qui, dès la première lecture, nous a saisis par sa force et son originalité. Sa forme même nous invite à explorer une autre manière d'aborder le théâtre.

Écrite en vers libres, la voix intérieure de ces personnages prendra corps à travers la performance d'Agathe Molière et de Stéphane Facco accompagnés par le son composé par Nihil Bordures. Les deux acteurs se chargent de porter une parole fragmentée, divisée, déchirée par cette crise qui traverse les têtes, transperce les corps ; les variations rythmiques, l’énergie, l’organicité des mots prendront leur ampleur en s’appuyant sur les sons, la musique.

À chaque séquence, le visage d'un des quatre personnages apparaît projeté sur grand écran, chacun écoutant silencieusement sa voix intérieure, dévoilée publiquement. Chaque portrait semble ainsi se parler à lui-même pour mieux saisir ce qu'il est en train de vivre, de subir le plus souvent ou de faire subir à un inconnu sans même vouloir le savoir. Pour ressaisir une part de son être qu'il ne parvient plus à reconnaître. Tous se sentent pris au piège d'un filet de contraintes. Chacun aspire à s'en délivrer pour partir vers une vie meilleure, ailleurs, quelque part, où ?

Sur ces grands portraits rebondit et se répercute une langue parlée, rude, rapide, répétitive, parfois, non sans humour, proche d'un sabir technique. Le rythme râpeux des mots, des notes de musique et des matières sonores, nous l'imaginons se déployer dans l'espace dépouillé dont Philippe Marioge a le secret.

Au cours de cette traversée, les portraits de ces quatre pions anonymes de mondialisation perdent inexorablement de leur éclat, de leur netteté, se dissolvent lentement sous l'effet de l'acide de ce récit.

Nous ressentons l’urgence à donner à entendre cette pièce qu'Alexandra Badea a écrite « comme on appelle une ambulance ».

Aurélia Guillet et Jacques Nichet, novembre 2013

  • Extraits

1. Responsable assurance qualité sou-traitance, Lyon (H)
Tu ouvres les yeux
Paupières lourdes
Ton corps glisse sur le drap
Contraction du grand adducteur
Spasmes multiples du triceps
Sécheresse de la muqueuse buccale /
Tu ouvres les yeux et tu les refermes /
Agression de l’environnement
L’odeur du lit ne t’appartient pas
Rien ne t’appartient ici
Même pas les allumettes, les bouteilles de whisky en plastique, les cotons tiges,
les pantoufles jetables ou la cire à chaussure /
Tu es pulvérisé dans l’espace
Tu es hors du temps paumé entre des latitudes et des longitudes qui s’embrouillent dans ta
tête
Dehli, Tokyo, Dakar, Sao Paulo, Kiev, Hong-Kong, Santiago /
Tu ouvres les yeux
Tu t’accroches à ton oreiller et cherches /
Pendant quelques secondes tu es incapable de te situer sur ta carte géographique intérieure
Tu fermes les yeux
Rabat, Mexico, Bucarest, Kinshasa, Melbourne, Kuala Lumpur
Rien rien rien de tout ça
Ton regard flou balaie la chambre 9715
Le même intérieur cinq étoiles, design formaté identique aseptique et serein pour que tu
retrouves tes repères de
Bogotá à Saint-Petersbourg
Your Host from Coast to Coast /
Un seul détail te sauve
L’étiquette de ton bagage SHA comme Shanghai
[…]

6. Opérateur de fabrication, Shanghai (F)
Tu franchis la bande sensitive jaune tracée sur le sol
Désormais tu pourras plus quitter sans dérogation le périmètre qu’elle entoure
Sinon alerte et si alerte amende et si amendes multiples tu risques d’être virée
Alors tu restes à ta place sur une surface d’un mètre carré dans un espace illimité
Et tu regardes la caméra de surveillance le temps d’écouter les instructions de sécurité et les
slogans de l’entreprise
« Si tu ne t’appliques pas au travail aujourd’hui
Demain tu t’appliqueras à trouver du travail »

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Théâtre de la Commune

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Théâtre de la Commune
2, rue Edouard Poisson 93304 Aubervilliers
Spectacle terminé depuis le samedi 5 avril 2014

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