Devant la toile projetant le film de GW Pabst, Journal d'une fille perdue interprétée par Louise Brooks, Hanna Shygulla prête sa voix profonde et sensuelle à l'actrice, accompagnée de six musiciens.
Elle! est un hommage au " mystère " Louise Brooks .
Des rencontres lumineuses et déterminantes sont à l'origine de cette création : celle
entre le compositeur Roberto Tricarri, passionné de cinéma muet et l'actrice Hanna
Schygulla, précédée de la " rencontre " ( au travers de l'écran) d'Hanna
Schygulla avec celle qui deviendra sa muse, Louise Brooks. Le film " Le Journal d'une
fille perdue " s'est alors imposé avec l'univers de Pabst, son cinéma du clair et
de l'obscur, de la grâce et de la perversité.
Sans nostalgie historique, le cinéma muet est au même titre que les grandes uvres
classiques, un support intemporel de créations contemporaines où peut se rejouer
librement le rapport amoureux entre la musique et l'image. Profonde et sensuelle, la voix
portée par la musique, offre une nouvelle lecture sensible de ce chef-d'uvre.
Seule en scène dans un prologue, Hanna Schygulla rejoint bientôt les musiciens. Vient
alors l'obscurité, puis la lumière qui fait vivre à nouveau les ombres. La voix, la
musique, le silence s'unissent et peuvent résonner, pour chacun d'entre nous, artistes
sur la scène et spectateurs dans la salle, comme de voix intérieure.
" Le journal d'une fille perdue " est un hymne à la liberté sexuelle,
flétrissant l'hypocrisie d'une société corrompue. Ce film bouscule les convenances et
exalte avec éclat l'insoumission et la beauté. Pour ne pas vexer de front autorités et
producteurs, Pabst choisit un scénario mélodramatique qu'il va retourner en son
contraire par la mise en scène et l'ambiguïté cristalline en diamant noir de son
actrice, transformant ainsi le film en " anti-mélo "
Louise Brooks emplit l'écran de sa présence magique et apporte au film un érotisme de
tous les instants. Il en résulte un jeu sublime qui dépasse l'interprétation. Un jeu
où tout l'être est en jeu.
" Tourné voici 70 ans, " Le journal d'une fille perdue " constitue, à
tous égards, par le style de son cri, l'une des grandes fresques non point du siècle
ancien, mais du nouveau ; car derrière une apparence que la technique du muet rend
trompeuse, ce film s'attache à la société vécue aujourd'hui par les Occidentaux. Les
censures qui s'acharnèrent sur des séquences jugées choquantes (largement restituées
maintenant) avaient instinctivement compris cette permanence à venir et le caractère
scandaleux de leur effroi
Il nest pas indifférent que la projection, en ce début de millénaire, soit
accompagnée de la présence et de la voix d'Hanna Schygulla qui, montant des
chefs-d'uvre de Fassbinder liés au Troisième Reich vaincu, revient jusqu'à nous
à travers lune des inoubliables hantises de la problématique sociale, dessinée au
couteau pendant la république de Weimar" FREDDY BUACHE
"Sans nostalgie historique, le cinéma muet est pour moi, au même titre que les
grands textes classiques, un support intemporel de créations contemporaines où peut se
rejouer librement le jeu passionnant et complexe de l'image et du son.
Après quinze années de compagnonnage musical sur les images muettes de ce cinéma, cette
future création est née du désir secret de la voix. Nourri d'une enfance vécue dans
les murs d'un opéra, ce désir attendait une complicité...
La rencontre avec Hanna Schygulla fut lumineuse et déterminante. Ensemble, nous avons
rêvé, et Louise Brooks -l'actrice et la Femme- est alors venue éclairer l'évidence du
chemin. Nous avons découvert " Le Journal d'une fille perdue " qui s'est
imposé avec l'univers de Pabst, son cinéma du clair et de l'obscur, de la grâce et de
la perversité. Cette uvre bouscule les convenances et exalte avec éclat
l'insoumission et la beauté.
Seule en scène dans un prologue, Hanna rejoint bientôt les musiciens. Vient alors
l'obscurité, puis la lumière qui fait vivre à nouveau les ombres.
Profonde et sensuelle, la voix d'Hanna portée par la musique, offre le partage d'un
univers onirique, d'une nouvelle lecture sensible de cet hymne à la liberté qu'est
" Le Journal d'une fille perdue ".
La voix, la musique, le silence se rejoignent et deviennent pour chaque spectateur comme
sa propre voix intérieure. "
Roberto Tricarri
"Bien sûr, on m'a souvent demandé qui était mon idole. Et moi je n'étais pas
si sûre que j'en avais une... Ou alors peut-être... s'il en fallait une alors
peut-êtreà la sortie de mon adolescence Brigitte Bardot la femme animale et un peu plus
tard: Marilyn Monroe la femme séductrice et un peu plus tard : Jeanne Moreau la femme
mystère et un peu plus tard : Simone Signoret la femme tout court et encore plus tard :
Ingrid Bergmann l'être tout court et puis beaucoup plus tard... j'étais devenue
moi-même actrice de cinéma... Je rencontre mon étoile-phare. Je la rencontre dans le
vieux film muet " Loulou " de Pabst, celle qui était toute les autres en une...
Louise Brooks.
A peine je la vois... je sais que c'est elle. Elle rayonne d'une telle essence de rare
pureté, ça donne le vertige comme l'être plus fort des enfants pas encore apprivoisés,
ça vient d'une zone où la morale ne s'y est pas encore enracinée, où la vie ne se
cache pas encore derrière les masques de nos jeux sociaux, c'est le choc de la pureté
sauvage. C'est à travers Louise Brooks, peu importe qu'elle fût habillée en blanc ou en
noir, que j'ai vu apparaître sur l'écran la belle nudité de ce que j'ai envie d'appeler
: " L'enfant achevée qui s'est réveillée femme ". Cela invite à vouloir
toucher au " Mystère : Louise Brooks "... C'est pour cela qu'il m'a paru tout
naturel de vouloir lui rendre hommage...
Quand Roberto Tricarri m'a proposé de m'embarquer dans sa belle aventure : réinventer le
son du film muet " Journal dune fille perdue ". Et comment ? Peut-être est-ce
possible de rendre cet hommage au travers d'une sorte de poème sonore ?
Peut-être même est-ce possible de décoller de la fable vers un flot de conscience par
certains moments . Ces moments de vertige par exemple où Louise Brooks " tombe dans
les pommes d'un paradis perdu ", les moments où elle glisse dans
l'évanouissement... ces moments où elle se défait de sa vie actuelle comme d'un gant
qui empêche le contact avec sa nature profonde, son côté illimité... et qui selon moi
est la nature profonde de nous tous. Et dans ce flot de conscience pourront s'entremêler
nos esprits Hors temps hors champs. Et pourtant au cur des ténèbres de la même
salle de projection. "
Hanna Schygulla
Avenue des Maréchaux 16007 Angoulême