Faces

Nanterre (92)
du 4 au 11 avril 2009
1h40

Faces

Cassavetes a tourné Faces dans son appartement, où se joue la quasi-totalité des scènes du film. Nous sommes sans cesse comme invités chez lui mais aussi chez ses personnages. Daniel Benoin veut, de la même manière, inviter les spectateurs de théâtre à être les témoins de l’histoire de ce couple qui semble se désagréger en une nuit et qui finalement se retrouvera peut-être le lendemain matin.

Entre cinéma et théâtre
Faces, la pièce
Un diptyque: rupture du couple
La réalisation de Faces

  • Entre cinéma et théâtre

Après l’expérience d’avoir mis en scène Festen, Daniel Benoin s’était promis de remettre en chantier ce type de recherche consistant à adapter au théâtre des films, souvent majeurs dans l’histoire du cinéma, qui ont pour caractéristique la recherche d’une proximité sinon d’une intimité entre les comédiens et le public.

Chez Cassavetes, comme chez Vinterberg près de 30 ans plus tard, la caméra traque chaque visage, chaque intention, chaque émotion au plus près, au plus serré, comme pour voler aux acteurs-personnages ce qu’ils ont de plus personnel sinon de plus secret. Pour obtenir un résultat équivalent au théâtre, il est clair qu’il faut trouver le lieu qui permettra la proximité, la participation du public.

Dans le cas de Faces, Cassavetes nous donne involontairement une solution : il a tourné le film dans son appartement pendant plus de 6 mois, faisant de ses canapés, de son lit, de sa cuisine, les lieux où se joue la quasi-totalité des scènes du film. Nous sommes sans cesse comme invités chez lui mais aussi chez ses personnages : Richard, Jeannie, Maria… Daniel Benoin veut, de la même manière, inviter les spectateurs de théâtre à être les témoins de l’histoire de ce couple qui semble se désagréger en une nuit et qui finalement se retrouvera peut-être le lendemain matin.

D’après le film de John Cassavetes. Traduction et adaptation de Linda Blanchet et Daniel Benoin.

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  • Faces, la pièce

Une crise du couple qui est aussi une crise existentielle, c’est ce que vivent Maria et Richard Forst dans un moment-clé : une nuit de prise de conscience de l’illusion qu’est leur couple, du vide de leur existences , de la confusion qu’ils entretiennent entre agitation et qualité ou densité de vie. L’univers humain qui les entoure est à leur mesure, fait de suffisance matérielle, de mépris, de stupidité satisfaite de refus du réel.

  • Un diptyque : Rupture du couple (1934 > 2007)

“ Naguère un mari trompé répudiait sa femme. Ça nous semble aujourd’hui purement ridicule. Dans vingt ans, c’est nous qui ferons rire... de notre résignation - ou de notre hypocrisie - de notre respect des lois, des coutumes établies et des usages les plus usagés... Aucune loi, aucune considération, rien enfin ne doit contraindre deux êtres qui ne s’aiment plus à continuer à vivre côte à côte... ” ( Le Nouveau Testament, 1934).

Ces quelques phrases font partie de la conclusion visionnaire de Guitry dans sa pièce. Pour lui le couple n’existera plus à partir du milieu des années 50. En 1968, John Cassavetes en filmant Faces repose à sa manière et avec ses mots la même question et met à jour ses propres conclusions : “ C’est formidable. Tout à fait nouveau. La noble infidèle. Je pense que tu devrais être récompensée. Je vais instaurer de nouvelles règles. Tu es infidèle. Je tue ton amant. Je vais en prison. Et toi, la femme infidèle, tu toucheras la prime. Ça te va ? Me voilà rejeté pour la millième fois en quatorze ans. Elle s’en fout. Il ne me reste plus qu’à retrouver ce violeur et à le tuer. Et tu toucheras la prime. Tu n’as plus besoin de moi. Tu n’as plus besoin d’aucun homme. ” (Faces, 1968).

Si je me propose de laisser la pièce de Guitry dans son contexte historique et social de l’avant front populaire, avec cependant toute la force de sa projection au-delà de la deuxième guerre mondiale, le film de Cassavetes peut paraître plus intemporel, réunissant tous les éléments de la crise amoureuse née de 1968 et se prolongeant jusqu’en 2009. Dans un décor unique mêlant acteurs et spectateurs, comme si ces derniers étaient en première ligne dans les interrogations qui surgissent entre les couples (Jean - Lucie, Richard - Maria, Adrien - Marguerite, mais aussi Chet - Marie, Richard - Jenny, Jean - Marguerite, Lucie - Ferdinand...), leurs ruptures, leurs retours, leurs fuites, leurs indécisions... ce diptyque entre deux auteurs aussi différents prend des allures d’étude clinique, presque scientifique, sur le devenir des mots “ être ensemble ”.

Daniel Benoin

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  • La réalisation de Faces

Lorsque John Cassavetes réalise Faces il est au creux de la vague. Il vient de réaliser A Child Is Waiting et ce fut un échec douloureux. Il se tourne vers le théâtre et écrit The Fa and the Eight qui servira de base au tournage de Faces.

Le tournage va durer six mois, trois cents personnes ont participé à un titre ou à un autre au film. À partir de rien elles ont fait une chose qui existe. Grâce à leur détermination, sans équipement, sans connaissances techniques - il n'y a qu'un technicien – après un montage qui va durer deux ans et en transformant sa maison en studio de tournage, ses canapés et ses lits en lieu où se tournent les plans, en demandant à tous d'improviser en grande partie leur texte, John Cassavetes va réussir un film qui deviendra très vite " culte ". Encore une fois - comme chez les cinéastes de Dogma vingt-cinq ans plus tard - la caméra traque chaque visage, chaque émotion comme pour voler aux acteurs ce qui leur est le plus intime.

Il dit de Faces : " C'est un film que j'ai aimé faire, parce que j'aime voir les choses se faire. Je sais que personne d'autre que moi n'aurait pu le faire, tant je m'y suis engagé, tant il a fait partie de ma vie. " On retrouve en effet dans ce film tout ce qui va marquer les films suivants : le caractère individuel des personnages avec toutes leurs contradictions, la menace que représentent les conventions ainsi que l'expression totale de la personnalité. Retrouver tout cela au théâtre est un défi, très similaire à celui de Festen. C'est une perspective passionnante.

Daniel Benoin

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7, av. Pablo Picasso 92000 Nanterre
Spectacle terminé depuis le samedi 11 avril 2009

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