(…) Pourquoi une nouvelle traduction d’Hamlet ? parce que j’ai toujours été frappé par la difficulté des textes de Shakespeare que je voyais mis en scène ! L’un des plus grands auteurs au monde écrirait-il des choses incompréhensibles ?
Quand on traduit Shakespeare, il faut prendre des libertés pour lui rendre un langage délié et prégnant quelle que soit l’époque à laquelle on le met en scène. Hamlet est rempli de références à la culture de son temps. C’est pourquoi je veux utiliser des mots actuels ou ceux du monde de la variété. On chantait aux spectateurs de l’époque ce qu'eux-mêmes chantaient dans la rue, on leur racontait les histoires qu'ils se racontaient, intégrées à l'intrigue. Cela n'a pas de sens aujourd'hui de les restituer tels quels. Cette pièce n'est pas un musée !
La tendance francophone à tout romantiser, parce que le 19ème siècle est passé par là, a également marqué de son empreinte beaucoup de traductions. Le personnage d’Ophélie a été tellement romantisé qu’on ne le comprend plus. Quand Hamlet lui dit « go to the nunery », on traduit toujours par « va au couvent » mais « nunery » veut aussi dire « mauvais lieu, bordel ». Pour le public anglais, l’ambiguïté est claire. Alors pourquoi faire coller la traduction au mythe romantique ? Moi, j’ai traduit par « va au couvent à putes », ce qui donne une matière textuelle que j’affectionne. Hamlet est une pièce très concrète, ce n’est pas de la poésie abstraite et Shakespeare n’a pas inventé le romantisme en 1600 ! (…)
La religion que je considérais dans cette pièce comme un simple folklore est en fait centrale. Diluer cet aspect permet de faire surgir une certaine brutalité. D’où cette « version athée » : en enlevant à Hamlet sa foi et son fanatisme, on obtient une sorte de personnage animal qui traverse la société en la rejetant. Il devient une sorte d'anarchiste, ce qui finalement le rend encore plus humain.
Cela pose aussi la question de la nécessité de croire en quelque chose, pas forcément au sens religieux, ainsi que la question de l'héritage. J'ai toujours eu dans la tête un Hamlet fils de mai 68 ré-interrogeant sans cesse son héritage familial, politique. Je trouve très actuel cette difficulté de se fixer dans la croyance de quelque chose. Le flou constant autours des filiations - « qui est père et enfant de qui ? » - participe également à cette absence de repères. (…)
Le regard d’Hamlet sur la société, face à ce monde qu’il dit « pourri », contre lequel il ne sait comment se battre, nous a menés au mythique « être ou ne pas être », phrase qu’on réduit toujours à une réflexion sur la vie et la mort. Il s’agit d’un regard beaucoup plus projeté sur la société, avec de nouveau la présence de la religion. « Car pour justifier le fait qu’on vive, on parle de respect et ce respect nous donne ces si longues vies si misérables. Car sinon qui ici pourrait supporter les objections et les mépris de notre époque, tous ces oppresseurs, ces fiertés mal placées, toutes les amours bafouées, cette justice si lente, cette administration insolente, toutes ces brimades que des minables petits chefs font subir à des pauvres gens honnêtes »*.
Hamlet dans son inaction propose tout le temps la possibilité de la rébellion, il est montré de façon à ce qu’on ait envie, nous, de réaliser quelque chose. J’ai revu Orange mécanique de Stanley Kubrick, et je vois en Alex un Hamlet possible, comme vecteur terroriste, ré-interrogateur de la société. Car n’oublions pas qu’il est le premier meurtrier de cette pièce, en tuant, ou en laissant faire celui qui va à la mort.
D'après un entretien avec Armel Roussel
* traduction A. R.
Par la compagnie utopia II.
Un vrai régal!!! Du théatre comme on aimerait en voir plus souvent... Je ne m'en passe plus et y retourne ce soir. Un énorme merci aux comédiens, brillants, généreux, talentueux. Une belle leçon de vie, un reflet de la société parfaitement respecté. Bravo à Armel Roussel.
Un vrai régal!!! Du théatre comme on aimerait en voir plus souvent... Je ne m'en passe plus et y retourne ce soir. Un énorme merci aux comédiens, brillants, généreux, talentueux. Une belle leçon de vie, un reflet de la société parfaitement respecté. Bravo à Armel Roussel.
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