Un réveillon selon Copi
La presse
Un vaudeville déjanté, un polar parfait
Copi fut et reste le plus argentin des auteurs de langue française, un des plus novateurs, des plus inventifs dans cette langue admirée qu’il appelait sa “langue maîtresse”. Ses talents multiples de dessinateur, acteur, auteur dramatique, metteur en scène, en firent une des figures marquantes des milieux artistiques des années 70. Avec La tour de la Défense, il a écrit sa pièce la plus classique, la plus construite, la plus “française” en mêlant les ressorts du vaudeville et de la comédie policière.
Dans un appartement d’une tour du quartier de la Défense pendant la nuit du réveillon du 31 décembre 1976, éclate un drame comicopsychologique mettant en présence une galerie de personnages… Des homosexuels en crise d’identité, un travesti affublé d’une mère abusive, une hystérique sous acide croisent un boa évadé et un rat délicieusement cuisiné pour un repas de fête délirant qui se transforme en enquête policière après la découverte, au milieu du salon, d’une petite fille morte dans une valise. C’est avec un humour féroce et décapant que Copi nous entraîne, en nous faisant rire aux éclats, vers le précipice au fond duquel nous attend l’inévitable. La tour de la Défense est un vaudeville moderne et déjanté dans un espace design fonctionnel et propre.
Avec Marcial Di Fonzo Bo et ses acteurs, dont Marina Foïs en remarquable Médée déjantée et planante, cette fête macabre rend au plus près la force provocatrice intacte de l’auteur, le désordre apparent d’une mécanique intraitable, la folie contagieuse d’un monde qui se veut libéré, le regard décalé mais prémonitoire d’un Copi sans doute plus actuel que jamais.
"Un spectacle fou comme seul Copi a su l’être." Le Monde
"Comme tous les mélanges, réveillon ou pas, ça décoiffe sévèrement. Du Copi saignant et acide. Inoubliable." Les Inrocks
"Une tragédie déguisée en vaudeville ! À la fois azimutée et relâchée, Marina Foïs est celle qu’on ne quitte jamais des yeux." Libération
"Marcial Di Fonzo Bo et sa bande des Lucioles ont trouvé les justes frontières entre dinguerie et tragédie, Marx Brothers et thriller, fou rire et horreur, pour dynamiter un texte rare qu’on entend enfin dans sa singularité." Télérama
Jouer Copi aujourd’hui est vital, voici quelques raisons : Copi est lucide, percutant, drôle, hilarant même, terroriste, chic, noir, et efficace à chacune de ces répliques. Sa vision du monde est moderne et libérée. Sa rage pour décloisonner la pensée unique est essentielle pour tous les artistes. Sa simplicité et sa franchise continuent de déranger, aujourd’hui encore plus qu’il y a trente ans. Sa poésie est profondément politique, sans morales ni leçons. Son humour décapant demeure la preuve que l’homme peut être maître de son destin et non pas sa fatale conséquence. En jouant ces textes on rit, et ces rires font du bien, car derrière l’apparente légèreté, c’est de nous-même que nous rions, de notre souffrance, notre peur de vivre, nos tabous. Sa liberté nous fait du bien. Elle nous fait réfléchir.
Comment peut-on présenter La tour de la Défense ?
Cette pièce est intrigante, car elle est rarement montée. Pour
approfondir ma rencontre avec Copi, j’aimais bien l’idée d’aller
dans ce qui était le plus éloigné de l’idée que le public se fait de lui.
Ici, la folie va plus loin. Elle met en scène quelque chose d’extrême : dans un appartement du treizième étage six personnages
sont enfermés. Une sorte d’antichambre avant l’Apocalypse.
Le premier acte se passe le 31 décembre et le deuxième acte le
1er janvier, et les six personnages ont une heure et demie pour
résoudre leur destin, sans le savoir. Les personnages de La tour de
la Défense sont terriblement actuels. Copi parle comme personne,
de la solitude dans le monde actuel, et sa vision de l’humanité,
sa lucidité par rapport aux rapports humains, est incroyable. J’ai
toujours trouvé que cette pièce était à part dans son oeuvre, une
pièce très étrange. C’est la pièce la plus construite, la moins incohérente,
une pièce à suspense, un vrai scénario de cinéma. (...)
Celle-ci date de la fin des années 70, c’était le triomphe des
psycho-plays aux Etats-Unis, c’est donc d’un drame psychologique
qu’il s’agit, revu et corrigé, évidemment. Il y a aussi du vaudeville, de la comédie de portes. Ou encore un polar parfait. Jusqu’à la fin,
tu ne sais pas qui est l’assassin, ou plutôt, pourquoi un enfant a été
assassiné. Copi aimait le cinéma des années 40, les divas du
cinéma américain et les grandes heures du cinéma de suspense.
La pièce est aussi forte qu’un Hitchcock, j’en suis convaincu. (…)
Est-ce que, comme d’autres textes de Copi, La tour de la Défense
permet de mesurer le chemin parcouru depuis les années 1970 ?
La pièce date de 1976 et porte l’air de ce temps-là. Une liberté
sexuelle évidente, un mouvement très provocateur, très visible. Et
avec le recul, c’est sans doute encore pire que de la régression
quand on voit comment la société s’organise aujourd’hui, ce grand
vent de droite qui envahit l’Europe. Je monte la pièce parce que
c’est du grand théâtre avant tout. Un théâtre qui a parfois cette
fonction d’ouvrir certains endroits de la société sclérosés,
d’explorer le normatif. Quand on travaille Copi, il y a toutes ces
questions du décloisonnement, qu’est-ce que l’aliénation, pourquoi
on est sur scène… Copi aimait les acteurs et il aimait surtout
jouer lui-même. Son écriture est une porte ouverte à la liberté.
On le retrouve caché derrière chacune des répliques. (…)
Il y a un lien très fort entre Copi et vous !
Quand j’ai monté Copi, un portrait en 1998, j’ai vraiment eu le sentiment
d’une grosse bagarre. Il a fallu une certaine obstination à
défendre l’idée que Copi n’est pas que rigolo. Pourtant, quand on le
voit jouer lui, on change radicalement de perception. Les images
de lui dans Le Frigo, à plusieurs personnages, plusieurs costumes,
cela ressemble à du cinéma danois. Du ralenti, de la lenteur, ça
a quelque chose à voir avec le silence et le statique. Et les thématiques
sont tellement contemporaines ! Aujourd’hui, on est en plein
dans l’apocalypse de La tour de la Défense où chaque personnage
est porteur d’une mission. (…) Derrière l’humour, Copi ne sauve
personne ! Ce qui est très fort c’est le décloisonnement de la
pensée en général.
Très souvent je pense à lui, c’est comme un frère aîné. Par-delà l’idéologique, je me retrouve dans cette chose terriblement intime qu’est l’humour. Très peu de gens ont le même humour que moi, et ça tisse un lien particulier. L’humour révèle un rapport au monde, révèle comment on voit la vie, dans une sorte de décollement par rapport à la réalité. Je pense que les pièces de Copi sont comme une arme contre l’emphase, je pense qu’il propose cet humour dévastateur en réaction à la violence.
Extraits d’entretiens avec Marcial Di Fonzo Bo
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