Sur Ferrare règne la sombre et vénéneuse Lucrèce Borgia, femme de pouvoir aux mains tachées de sang, ajoutant aux crimes des Borgia celui de fratricide. Gennaro, fruit de son union avec son frère, ignore l’identité de ses parents. Lors d’un bal à Venise, Gennaro courtise une femme séduisante masquée, avant de découvrir avec horreur le visage de Lucrèce, Lucrèce tremblante d’amour pour ce fils qu’elle approche en secret, dissimulée dans la folie du carnaval. Piquée par l’affront des amis de Gennaro qui l’ont démasquée, et soupçonnée d’adultère par son mari Don Alphonse, Lucrèce enclenche une vengeance déchirante entraînant, sans le vouloir la perte de son fils.
« Prenez la difformité morale la plus hideuse, la plus repoussante, la plus complète ; placez-la là où elle ressort le mieux, dans le coeur d'une femme, avec toutes les conditions de beauté physique et de la grandeur royale, qui donnent de la saillie au crime, et maintenant mêlez à toute cette difformité morale un sentiment pur, le plus pur que la femme puisse éprouver, le sentiment maternel ; dans votre monstre mettez une mère ; et le monstre intéressera, et le monstre fera pleurer, et cette créature qui faisait peur fera pitié, et cette âme difforme deviendra presque belle à vos yeux. Ainsi, la paternité sanctifiant la difformité physique, voilà le Roi s’amuse ; la maternité purifiant la difformité morale, voilà Lucrèce Borgia ». Victor Hugo, préface de Lucrèce Borgia
Dans l’inconscient collectif, Lucrèce Borgia est une créature débauchée, cruelle, incestueuse, sanguinaire, bref, un monstre. Mais tous ceux qui ont écrit sur elle – au cinéma Abel Gance, Christian-Jacque, Walerian Borowczyk – au théâtre Mérimée, Alexandre Dumas, Victor Hugo, ont su tempérer ce portrait terrifiant en la peignant soit comme une amoureuse sincère et désintéressée, soit comme une mère infortunée qui attire la pitié. Dans le malheur, cette âme difforme retrouve une réelle et lumineuse beauté.
La tragédie grecque n’est pas loin : la pureté du sentiment qu’éprouve Lucrèce la contraint à se taire et cause fatalement sa perte et celle de l’être aimé.
Mais en fait la pièce de Victor Hugo relève du pur mélodrame : sentiments exacerbés, situations dramatiques, personnages impétueux, émotions poussées au paroxysme qui depuis le XIX° siècle enchantent le public populaire – le vrai public pour moi. Musset lui-même n’a-t-il pas clamé : « Et vive le mélo où Margot a pleuré » ?
Henri Lazarini
Dans Lucrèce Borgia se ressent plus qu’ailleurs l’influence du théâtre élisabéthain. Une histoire d’inceste à la manière de John Ford, poursuivie ici à la génération suivante : le fils de l’inceste devra périr, et d’une certaine façon par la main de sa mère. Réversion carnavalesque chère à Mikhaïl Bakhtine : c’est ici le fils qui poignarde sa mère qui l’a empoisonné. L’amour et la mort font plus que jamais bon ménage, et l’hécatombe finale sera à la mesure de l’immensité de l’amour de cette mère. Torrents d’amour et fleuve de sang. Cruauté du théâtre et théâtre de la cruauté : Hugo annonce Artaud.
La figure de la « grande mère dévoreuse » (CG. Jung) s’inscrit dans la continuité du travail de la Compagnie Minuit Zéro Une initié avec Médée. Les parents dévorent leurs propres enfants : Hugo et Ugolin, même combat ! Mais, par ailleurs, le massacre final des jeunes gens peut se lire comme une métaphore de l’angoisse de la jeunesse dont l’actualité répercute l’écho. Echo particulièrement aigu à notre présent historique bousculé par les attentats et l’extrémisme religieux.
« Dans Lucrèce Borgia, cette image de la mort dans la jeunesse est comme une explication de tout, Antoine Vitez, Le Monde 20/09/1984 ».
Confrontée à la mort et à l’exercice politique intempérant des Borgia, la jeunesse décrite par Victor Hugo revendique malgré tout son besoin de liberté, sa nécessité absolue de jouir de la vie et de ses plaisirs malgré les terreurs ambiantes cultivées par le clan Borgia. Le terme de mélodrame, lorsqu’il apparaît au XVIIIème siècle, est usité dans son acception étymologique de drame chanté. C’est proche de cette direction que la mise en scène a orienté son travail, en s’appuyant sur le lyrisme de la prose hugolienne et sur les situations exacerbées et les émotions paroxystiques qui sont à l’œuvre dans cette pièce : pas chanté à proprement parlé, mais musical à coup sûr.
Dans la version la plus souvent jouée, la dernière réplique de la pièce est un aveu de Lucrèce à Gennaro : « Je suis ta mère ». Nous avons choisi une variante de la pièce, version inédite de Hugo, qui nous semble combattre la mécanique du retournement hugolien pour privilégier une approche plus humaine de cette situation, pour dire la vérité impossible à entendre, clef de voûte du drame, contradiction fatale, jetant malgré tout dans le regard de Gennaro le feu, jusque-là incompréhensible, de l’amour maternel. Et c’est l’humanité qui est sauvée, rachetée.
Frédérique Lazarini
spectacle où les décors sont minimalistes, mais l'interprétation des acteurs très bonne, comme les costumes d'ailleurs. clientèle " de quartier", et au final un bon spectacle.
Nous étions très émus au salut ! La fin est bouleversante. Très beau duo de la mère dévoreuse et meurtrière et de son fils.Le mélodrame a quelque chose de fascinant. Bravo ! Antony. G.
La mise en scène de Frederique Lazarini est excellente et sa performance en tant qu'actrice interprétant une Lucrèce Borgia torturėe par son passé cruel et son amour maternel. Didier Lesour nous surprend avec un Gubetta facétieux et comique qui contribue beaucoup à la réussite de la pièce. Les costumes sont magnifiques. A voir absolument.
Pour 3 Notes
spectacle où les décors sont minimalistes, mais l'interprétation des acteurs très bonne, comme les costumes d'ailleurs. clientèle " de quartier", et au final un bon spectacle.
Nous étions très émus au salut ! La fin est bouleversante. Très beau duo de la mère dévoreuse et meurtrière et de son fils.Le mélodrame a quelque chose de fascinant. Bravo ! Antony. G.
La mise en scène de Frederique Lazarini est excellente et sa performance en tant qu'actrice interprétant une Lucrèce Borgia torturėe par son passé cruel et son amour maternel. Didier Lesour nous surprend avec un Gubetta facétieux et comique qui contribue beaucoup à la réussite de la pièce. Les costumes sont magnifiques. A voir absolument.
20, avenue Marc Sangnier 75014 Paris