Pour réunir sur scène Juliette Binoche et Nicolas Bouchaud, il fallait l’un des plus intenses et poignants affrontements du répertoire. C’est à un duel atroce que nous fait assister Strindberg, entre un valet trop bien doué, séduisant ambitieux et une jeune femme trop sensible à la supériorité de sa propre position, qui se sent comme captive au sommet d’une haute colonne.
Dans cette pièce tout semble se passer à la fois en l’espace de quelques heures pendant une nuit d’été et dans un temps qui échappe à toute mesure objective. Au-dehors la fête. Au-dedans, c’est d’abord le vin qui coule et la tension qui monte entre la jeune maîtresse et celui qu’elle trouble.
Frédéric Fisbach n’a pas oublié que Strindberg lui-même disait de sa pièce qu’elle est un « combat entre cerveaux », une sorte de long assassinat psychique. Il fallait inventer pour ce « meurtre d’âme » un espace qui rende sensible le fait que la lutte entre ces deux êtres se situe d’abord en eux-mêmes. Ici l’attention est donc portée sur les corps.
« Juliette Binoche est une Mademoiselle Julie magnifique. (...) Le duo formé par Juliette Binoche et Nicolas Bouchaud est assez exceptionnel. Ensemble, ils se jettent dans cette histoire folle et ne mesurent pas leurs efforts. Nicolas Bouchaud est somptueux en valet ambitieux, presque bestial. Un parfait monstre de lâcheté. Quant à Juliette Binoche, belle et fragile, légère et tragique, elle nous montre encore une fois, s’il en était besoin, qu’elle est une très grande actrice. » Les trois coups
« Mademoiselle Julie met les choses au point, elle « va raconter sa vie », et l’actrice Juliette Binoche met les choses au point avec elle. Elle parle, et beaucoup peuvent aller se rhabiller : ce n’est pas tous les soirs qu’on est témoin d’une aussi magistrale leçon d’intelligence du théâtre. […] Binoche n’a que faire des figures imposées de l’hystérie, de la passion ou de la douleur. Dans sa façon de souffler simultanément le chaud et le froid, dans sa capacité à tout canaliser, même quand elle se lâche. [...] Avec moins de violence et plus de failles. Et quand elle dit doucement, «il faut être gentil avec moi», on entend toutes les nuances de la colère, de la fatigue, de la séduction et du désarroi. » René Solis, Libération
« Julie-Juliette sait remarquablement réunir le désarroi, la colère, la fatigue et les élans d’amour dans l’expression de son visage et dans son corps ; elle dégage la fragile volupté de la belle Julie. » Un Fauteuil pour l’orchestre
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