En anglais, surtitré.
À la fois thriller sanglant, farce romantique, opéra satirique et tragédie gothique, Sweeney Todd est la comédie musicale la plus ambitieuse de Stephen Sondheim, dont Tim Burton a tiré un film célèbre avec Johnny Depp. Après A Little Night Music, voici un autre chef-d’œuvre de Sondheim enfin présenté en France, plus de trente ans après sa création triomphale à Broadway.
Musique et paroles : Stephen Sondheim
Livret : Hugh Wheeler
Adaptation : Christopher Bond
Orchestrations : Jonathan Tunick
Direction musicale : David Charles Abell
Par l'Ensemble orchestral de Paris (jusqu’au 7 mai) et l'Orchestre Pasdeloup (du 11 au 21 mai)
Londres, 1846. Condamné au bagne 15 ans auparavant par le juge Turpin qui convoitait sa femme, le barbier Benjamin Barker a réussi à s’évader et il se réinstalle dans la ville sous le nom de Sweeney Todd.
Apprenant la mort de sa femme et l’adoption de sa fille par Turpin, Sweeney décide de se venger en attirant le juge dans son salon de barbier et en l’égorgeant. Mais sa première tentative échoue. Fou furieux, Sweeney assassine dès lors tous ses clients, dont la voisine, Mrs. Lovett, récupère les cadavres afin de faire tourner sa boutique de tourtes à la viande.
Bien que leur entreprise monstrueuse soit florissante et que Mrs. Lovett rêve d’une vie embourgeoisée avec ce Mr. Todd qu’elle aime tant, Sweeney reste obsédé par sa vengeance. Lorsqu’il parvient enfin à la mener à bien, il créé aussi son propre malheur… Seuls réchappent au massacre final Tobias, adolescent simple d’esprit, Johanna et son amoureux, le marin Anthony.
Alain Perroux
L'adaptation de Stephen Sondheim présente le personnage principal comme une victime de la société. En revisitant les clichés du mélodrame, l’ouvrage offre une parabole des temps modernes : victime d’une société oppressante, Sweeney Todd devient un être digne de pitié, une « machine à tuer » de l’ère industrielle qui fait la fortune de sa voisine, symbole d’un capitalisme cannibale. Dotée du rythme échevelé propre à la comédie musicale, farcie d’envolées lyriques, l’œuvre insuffle à sa structure épique héritée de Brecht et Weill, un suspense de thriller et un souffle tragique proche de l’opéra. Couvert de prix (8 Tony Awards), souvent repris, Sweeney Todd a fait le bonheur de plusieurs scènes d’opéras et a été adapté au cinéma par Tim Burton en 2008.
On se perd en conjectures sur l’origine de cette histoire. Vraisemblablement la classerait-on de nos jours dans la catégorie des « légendes urbaines ».
La première apparition du personnage de Sweeney Todd date de 1846, dans une nouvelle de Thomas Peckett Prest intitulée The String of Pearls : A Romance. Le récit s'inspire lui-même de plusieurs faits divers et présente certaines similitudes avec un conte publié à Londres en 1825 et avec un poème catalan du XVe siècle.
Par ailleurs, une histoire assez similaire se serait déroulée en France. En 1387 à Paris, rue des Marmousets (actuelle rue Chanoinesse, sur l'Ile de la Cité), un barbier et son voisin, un pâtissier, furent arrêtés suite à une tentative de meurtre sur la personne d'un nobliau de Touraine. Arrivé en début de soirée à Paris, le jeune homme avait voulu se faire raser avant de se présenter à sa famille, et avait failli avoir la gorge tranchée par le barbier. Parti prévenir la Maréchaussée, il avait permis la découverte d'un trafic terrible : le barbier coupait le cou aux clients de passage, puis fournissait à son voisin de quoi fabriquer des pâtés en croûte renommés dans la ville tout entière. Les deux criminels furent brûlés vifs à l'emplacement de leurs maisons. Cette histoire est relatée par l'écrivain Jacques Yonnet dans son livre Rue des Maléfices (Denoël, 1954).
1, place du Châtelet 75001 Paris