« Sur la dalle de béton coulé s’édifie l’époque nouvelle. Le projet architectural peut enfin rassembler le monde dans « la tour ». L’architecte a tout prévu. Mais son incroyable idée de prévoir un aéroport dans la tour est jugée trop dangereuse. Alors elle est renvoyée. Il n’est pas simple d’édifier un monde nouveau. Il faudra bien s’entendre et que tout le monde y trouve sa place. Du moins que chacun soit assigné à une place. Il ne faut oublier personne. A tous les étages, on accueille, on rassemble, on organise pour le bien collectif. La vétérinaire s’affaire à épouser le candidat. Le candidat s’affaire à son devenir présidentiel. Le conseiller veille à la bonne tenue des comptes et de la pensée. Sans oublier les artistes. Il y a bien le souci des sans-papiers, mais on devrait bien arriver à les caser comme les autres finalement. Que la tour soit prête à rejoindre le ciel. Oui, mais au bout du compte, que peut encore avoir à imaginer un état si prospère ? Le conseiller doute et trouve sans mal sur son chemin l’âme malheureuse prête à gripper la machine. Vient alors le temps de la chute de « l’époque édifiante. »
Sophie Courade
Nous sommes conviés, en cercle ou en carré, autour d’un trou et d’une tour qui se dresse et se tend vers le ciel. Une parabole sur le toit de cette fable. La tour explose, le dernier étage reste. La Tour est une œuvre post - 11 Septembre 2001 et pré - St-Bernard. Ou vice versa.
En 1990 les premiers mots de ce projet étaient : « C’est difficile à imaginer ». Le monde, tel qu’il était déjà, sera traversé par quinze années de rêves et de cauchemars. Coup d’état de l’inhumaine imposture. Le câble de l’ascenseur a lâché. Deux avions dans des tours jumelles. Une hache dans la porte d’une église.
Est-ce qu’on voit l’avenir ? Est-ce qu’il est écrit ? Qu’est-ce qui est écrit de ce monde ? Voilà où nous en étions et sommes et serons quinze années plus tard. Une tour hantée. Hystérique. Et des filins, des fils, beaucoup de liens avec le grand dehors. La verticalité assistée.
Il se trouve parfois que la malédiction du « rien à inventer » baisse la garde. Et qu’un poème dramatique se retrouve là par la force des choses. Sommes-nous prêts à raconter ? Enfin prêts ? Qui arrachera notre langue ? Ce n’est pas joli. Pas beau. Mais humain certainement. Et pour ça, le plus drôle se mélange au plus triste. Le plus lisible au plus incompréhensible. Et le vertige nous prend, sans doute.
Gérard Watkins
« Dans la nouvelle tour, l’architecture est la guerre faite au « différent », les pierres sont nos propres os et le mortier est notre propre sang. Peu importe que nous nous en rendions compte ou non, le pouvoir construit et impose une nouvelle géographie des mots. Les noms sont les mêmes, mais ce qu’ils désignent a changé. C’est ainsi que l’erreur devient doctrine politique et la vérité devient hérésie. Le« différent » devient maintenant le « contraire », l’« autre » est l’« ennemi ». La démocratie est l’unanimité dans l’obéissance. La liberté se limite à celle de choisir la façon de cacher notre différence. »
Sous Commandant Marcos
41, avenue des Grésillons 92230 Gennevilliers
Voiture : Porte de Clichy, direction Clichy-centre. Tout de suite à gauche après le Pont de Clichy, direction Asnières-centre.
A 86 Sortie Paris Porte Pouchet. Au premier feu tourner à droite, avenue des Grésillons.