Coup de cœur CONTEMPORAIN Le 8 janvier 2025
Dans l’Angleterre du XVIIIe siècle, douze femmes sont arrachées à leur quotidien pour intégrer un jury populaire. Un spectacle au suspense haletant qui fait résonner des thèmes brûlants d’actualité.
Le Firmament est un drame se déroulant en 1759, en Angleterre.
Alors que tout le pays attend la comète de Halley, Sally Poppy, une jeune domestique dont la vie n’a été que pauvreté et corvées, est condamnée à la pendaison pour le meurtre particulièrement violent d’une fillette, enfant d’une puissante famille de notables d’une petite ville de province. Cette jeune femme qui rêvait d’une existence différente, a été reconnue coupable - avec son amant.
Quand elle prétend être enceinte, un jury de douze femmes est réuni : celles-ci sont alors exemptées de leurs tâches ménagères quotidiennes et convoquées au tribunal pour décider si l’accusée dit la vérité ou essaye d’échapper à sa mort en affirmant attendre un enfant, ce qui commuerait sa peine en exil. Selon la loi, même si l’enfant n’est pas encore né, il est considéré comme un être vivant qui ne peut être coupable du crime de sa mère.
Ce jury populaire est composé de femmes de la ville de conditions différentes : l’une s’inquiète de pouvoir rentrer à temps pour récolter des poireaux, une autre de ses bouffées de chaleur, une est stérile, une autre a eu 21 enfants, etc. Seule la sage-femme, Elizabeth Luke, est prête à défendre l’accusée tout en savourant la rare opportunité pour des femmes d’avoir un pouvoir décisionnaire sur les événements dans un monde habituellement dicté par les hommes. Que faire alors de ce « pouvoir » dont on n’a pas l’habitude ? Le prendre, s’en remettre à d’autres, ou essayer de l’exercer selon ses critères personnels en essayant de prendre en compte une justice globale ?
Ensemble, alors qu’une foule s’insurge et réclame une sévère condamnation sous les fenêtres de ce tribunal à huis-clos, elles débattent et luttent, aux prises avec leur nouvelle autorité éphémère, sous le seul regard d’un huissier qui n’a ni le droit d’intervenir ni même de parler, tout en laissant émerger des récits de vie.
Entre anecdotes sans filtres et débats sur la politique de colonisation qui gagne le pays, avec humour et rage, se règlent des querelles de village et des conflits de classes dans une langue tant archaïque que contemporaine.
« Chloé Dabert nous donne à voir un théâtre singulier porté par son amour du texte et son sens de la direction d’acteurs. […] Très attentive aux détails de la langue, la metteuse en scène met leur talent au service du texte et non l’inverse. » France Culture
« Chloé Dabert a impérialement orchestré cette sauvage symphonie féminine. » Télérama TTT
Empruntant le chemin du drame juridique, Le Firmament campe un jury de douze femmes d’âges et de conditions très différentes, chargées de décider du sort d’une jeune domestique, Sally Poppy. Condamnée à mort pour meurtre, cette dernière affirme être enceinte afin d’éviter la peine capitale. Ancrée dans l’Angleterre de 1759, cette pièce de l’autrice britannique Lucy Kirkwood trouve dans son écriture libre, drôle et brutale, une modernité incisive et politique. La metteuse en scène Chloé Dabert y fait résonner des problématiques contemporaines, liées à la justice, au patriarcat et aux rapports de classe.
Cet art de nouer un récit haletant - inspiré du cinéma et des séries - tout en élargissant la focale à des préoccupations largement partagées aujourd’hui, est un trait saillant du travail de Lucy Kirkwood, déjà remarqué dans The Children (2018) ou Chimerica (2013). Avec Le Firmament, Chloé Dabert - aujourd’hui directrice de la Comédie - Centre dramatique national de Reims - poursuit son exploration des dramaturgies britanniques contemporaines, entamée avec plusieurs pièces de Dennis Kelly.
Après avoir créé quatre pièces de Dennis Kelly, désireuse de continuer mon exploration des dramaturgies britanniques, j’ai dirigé en octobre 2019 un laboratoire de recherche sur les écritures de Lucy Kirkwood et Caryl Churchill. Durant ces quelques semaines, la filiation entre ces deux autrices devenait chaque jour plus évidente : de Martin Crimp à Dennis Kelly, Churchill est la « mère » de toute une génération ; Lucy Kirkwood en est l’héritière et s’inscrit dans la continuité et la réinvention d’un rapport à l’écriture où la forme a autant d’importance que le fond.
La langue de Kirkwood se nourrit donc de cette tradition mais également des nouvelles écritures scénaristiques empruntées au cinéma ou à la télévision : une langue libre, faite de brutalité, d’humour et de modernité. J’ai été particulièrement séduite par la finesse des rapports entre les personnages et la façon dont l’humour finit toujours par nous amener vers le drame. Lucy Kirkwood dit, en parlant de son travail : « Pour moi, l’élément le plus important de tout type de théâtre est la métaphore. Je pense donc qu’il est possible de parler de grandes questions, à la condition de faire appel à son art, de faire de sa pièce autre chose qu’un pamphlet, sinon ce ne sera pas une expérience théâtrale particulièrement édifiante ».
C’est ce à quoi je suis particulièrement sensible et attentive dans tous les textes que je choisis. Je suis davantage intéressée par un texte dont les entrées sont multiples et qui nous raconte d’abord une histoire avant de chercher à nous délivrer un message.
Le Firmament est donc d’abord un scénario extrêmement bien construit, l’humour y est omniprésent, le suspens également, et l’émotion vient nous cueillir à la fin, après nous avoir laissé croire que l’histoire ne se finissait pas si mal malgré tout.
C’est aussi, ce qui n’est pas si courant, la volonté de réunir sur un grand plateau un groupe de 13 actrices d’âges et d’origines différents - Lucy Kirkwood précisant en préambule de son texte que « les matrones peuvent être de toutes origines ; il est même essentiel que le groupe reflète la population actuelle de l’endroit où la pièce est jouée ».
Car, bien que la pièce se déroule en 1759, elle fait subtilement entendre des résonances contemporaines : justice, déterminisme, passé colonial, patriarcat, place des femmes, de leur corps, tabous sur la maternité, bonne conscience de la classe dominante, haine du peuple envers les plus riches, nationalisme... ; tant de sujets et de questions qui traversent les débats d’aujourd’hui et sont au coeur de ce drame peut-être plus intemporel qu’il ne le semble. Lucy Kirkwood inscrit donc la petite histoire dans la grande. Telle une anthropologue, elle tisse des liens entre les temps et les lieux, nous rappelant que nous sommes dans une révolution perpétuelle, comme celle que la comète Halley entreprend au sein de l’univers et qui est à sa périhélie au moment du procès de Sally.
Chloé Dabert
Quelle ambition dans cette pièce d’une autrice anglaise actuelle. L’histoire, qui se déroule en 1759, est d’une force incroyable, chaque personnage féminin est différent des autres et tellement bien écrit et interprété. Ce groupe de 13 femmes nous fait rire et pleurer, en parlant et en montrant de tout ce qu’elles doivent supporter.
Excellentes comédiennes, très belle mise en scène !
Pour 4 Notes
Costumes et scénographie très réussie, surtout au début avec ces tableaux de scène projetés. Mais beaucoup trop long avec cet entracte. Le propos finalement est assez vide, pas assez fouillé, on ne s'attache pas aux personnages. Et cette violence inutile à la fin, je n'ai pas du tout aimé.
C’est beaucoup trop long et en plus, il y a un entracte. Le positif, l’esthétique et le jeu des actrices. Le négatif, ce n’est pas une pièce, c'est une suite de propos pas inintéressants, mais aucun personnage n’est attachant, je me suis ennuyée.
Quelle ambition dans cette pièce d’une autrice anglaise actuelle. L’histoire, qui se déroule en 1759, est d’une force incroyable, chaque personnage féminin est différent des autres et tellement bien écrit et interprété. Ce groupe de 13 femmes nous fait rire et pleurer, en parlant et en montrant de tout ce qu’elles doivent supporter.
Excellentes comédiennes, très belle mise en scène !
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