En Avignon, à la fin des intégrales des trois parties de Henry VI, les spectateurs debout après dix-huit heures de spectacle scandaient : « Richard III ! Richard III ! » Ils sont aujourd’hui exaucés : Thomas Jolly, qui interprétait lui-même le rôle du sinistre Duc de Gloucester, va conduire son personnage jusqu’à son couronnement puis l’accompagner dans sa chute, au terme d’une dernière bataille...
Richard est le premier grand maître de la mise en scène de soi que le théâtre ait produit. Ou du moins le premier personnage théâtral depuis Dionysos en personne (dans Les Bacchantes d’Euripide) à se mettre soi-même au monde théâtralement, sous le regard fasciné d’autrui. Si Richard est un être aussi extraordinaire, cela tient à ce qu’il est aussi son propre auteur, fils de ses œuvres, et que celles-ci, puisant leur énergie dans le goût de l’excès et l’irrépressible sens du jeu de leur auteur, témoignent de la sûreté de ses dons artistiques.
Richard se veut roi – nulle autre identité ne saurait lui suffire. Or cette identité royale lui est interdite. S’il veut pouvoir accoucher de sa royauté, il lui faut se frayer seul sa voie, que ce soit par la ruse – en multipliant les masques – ou par la force, et au besoin à coups de hache (ainsi qu’il le dit lui-même dans l'acte III, scène 2 du troisième Henry VI).
Il lui faut simultanément éliminer ses rivaux dynastiques au sein de sa propre famille (d’abord son frère Clarence, puis ses neveux Édouard et Richard, princes du sang et héritiers légitimes de son autre frère, Édouard IV), réduire à l’impuissance ses rivaux politiques (dont sa belle-sœur, la reine Élisabeth, ainsi que ses frères et ses fils d’un premier lit) et travailler à asseoir sa propre légitimité (par exemple en épousant Lady Anne, veuve du fils d’Henry VI). À première vue, la tâche paraît impossible. C’est précisément le contraste entre cette impossibilité initiale et les ressources d’intelligence rusée ou de soudaine brutalité que Richard, un effroyable sourire aux lèvres, déploie pour enfin la surmonter qui contribue à nourrir notre plaisir de spectateur – plaisir qui n’est sans doute pas sans rapport avec le souvenir des joies païennes ou enfantines que nous devons au cirque. Car Richard a quelque chose du pur histrion (ainsi lorsqu’il fait retomber sur la tête de Marguerite, la vieille reine-mère, les malédictions dont elle comptait l’accabler). Mais il est également un peu hypnotiseur – voyez comment il séduit Lady Anne. Un dompteur, aussi, qui n’a pas son pareil pour mater, soumettre ou encager les grands fauves politiques qui lui barrent la route. Et si l’on veut, un peu escamoteur : il propage des bruits sur Clarence qui entraînent sa condamnation à mort, puis fait opportunément disparaître la grâce trop tardive que lui accorde Édouard (et les remords du roi, déjà éprouvé par une longue maladie, précipitent sans doute son agonie).
Richard, en somme, n’est pas seulement une abomination de la nature, un bossu, un pied-bot, doté de dents dès sa naissance. « Richard » est le nom d’une machine à produire des possibilités théâtrales inouïes, proprement impensables. Derrière le monstre, il faut saluer le tour de force, voire le chef- d’œuvre d’une volonté de puissance qui ne cesse, scène après scène, de sculpter sa propre statue.
Trente-deux ans après l’inoubliable monstre d’Ariel Garcia Valdès, voici donc un autre Richard III qu’on vit grandir en Avignon, reprenant à nouveaux frais le cérémonial de sa propre invention, puis de sa déroute : après l’intégrale des Henry VI, la bande de la Piccola Familia est de retour pour mener à son terme, avec leur contagieuse vitalité, l’une des aventures théâtrales les plus follement ambitieuses de la décennie.
« L'esthétique - glacée - repose essentiellement sur des jeux de lumière sidérants. (...) Cette version flamboyante qui emprunte au rock, au cinéma, à la télé et aux jeux vidéo, met le bruit et la fureur du geste shakespearien au goût du jour. Le tyran du XVe siècle semble si vrai, si dangereux, si proche - contemporain, à vous glacer le sang. » Philippe Chevilley, Les Echos, 5 octobre 2015
J'avais en tête le Richard III d'Ostermeir et la vision de Thomas Joly, bien que très différente, est tout aussi intéressante et riche d'une autre perspective avec une dernière partie particulièrement époustouflante !
On sort du style classique pour voir une pièce moderne. Totale réussite.
J avais gardé un souvenir époustouflant de Richard 3 joué par Robert Hirsch. L interprétation du texte m avait captivé. Là le metteur en scène à voulu exister à côté du maître Shakespeare en se focalisant sur des effets spéciaux qui sont d ailleurs assez réussis. Résultat le texte est difficilement compréhensible mais surtout le jeu des acteurs est bâclé, leur diction simpliste. Le pompon revient à la reine Élisabeth qui crie et s agite. Il n y a aucune émotion ou finesse dans le jeu.
très bon spectacle, excellente prestation des comédiens, mise en scène étonnante (parfois un peu désagréable cependant : son trop fort, lumières éblouissantes qui empêchent de profiter du jeu des acteurs ou même d'entendre leurs paroles ; en fin à éviter absolument : les places chères et inutiles de de la corbeille à droite, car la moitié de la scène y est invisible or une grosse partie des actions se déroule dans cette zone de la scène!!! Ce théâtre est bien mal conçu, et la scénographie ne s'y est pas adaptée. Vraiment dommage.
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J'avais en tête le Richard III d'Ostermeir et la vision de Thomas Joly, bien que très différente, est tout aussi intéressante et riche d'une autre perspective avec une dernière partie particulièrement époustouflante !
On sort du style classique pour voir une pièce moderne. Totale réussite.
J avais gardé un souvenir époustouflant de Richard 3 joué par Robert Hirsch. L interprétation du texte m avait captivé. Là le metteur en scène à voulu exister à côté du maître Shakespeare en se focalisant sur des effets spéciaux qui sont d ailleurs assez réussis. Résultat le texte est difficilement compréhensible mais surtout le jeu des acteurs est bâclé, leur diction simpliste. Le pompon revient à la reine Élisabeth qui crie et s agite. Il n y a aucune émotion ou finesse dans le jeu.
très bon spectacle, excellente prestation des comédiens, mise en scène étonnante (parfois un peu désagréable cependant : son trop fort, lumières éblouissantes qui empêchent de profiter du jeu des acteurs ou même d'entendre leurs paroles ; en fin à éviter absolument : les places chères et inutiles de de la corbeille à droite, car la moitié de la scène y est invisible or une grosse partie des actions se déroule dans cette zone de la scène!!! Ce théâtre est bien mal conçu, et la scénographie ne s'y est pas adaptée. Vraiment dommage.
Dynamique , époustoufant , très signifiant quant à la conquête du pouvoir ..................
N'ayant jamais vu la pièce avant, j'ai peu de repères. Le coté positif : une très bonne scénographie de mon point de vue, un souffle nouveau, la participation du public qui donne du dynamisme à la pièce, le ton de certaines répliques. Le coté négatif : une grande partie de l'intérêt de la pièce réside dans le texte et il est souvent inaudible malgré les moyens techniques à disposition. Enfin, placé en corbeille au premier rang à droite en regardant la scène, un tiers de la scène était invisible (pour un prix maxi !)
Je ne suis généralement pas très convaincue par les relectures modernes des grands classiques, mais là, j'ai trouvé ce spectacle superbe ... et contrairement à ce que disent certains, totalement dans l'esprit de Shakespeare. Ce Thomas Jolly est un fabuleux metteur en scène et un acteur extraordinaire ! Seul bémol : sa voix ! ( diction trop saccadée, articulation parfois insuffisante , ce qui le rend souvent difficile à comprendre ... contrairement au reste de la troupe ! ). Mais l'ensemble est vraiment remarquable : j'irai voir ses prochains spectacles ! Un prof de lettres classiques
La mise en scène est audacieuse, l'interprétation de Thomas Jolly excellente (le personnage de Lady Anne aussi) et l'esthétique captivante (lumières, costume du personnage de Richard et musiques) Dans l'ensemble un spectacle jubilatoire, malgré quelques lourdeurs
Nous avons trouvé ce spectacle désolant. Le parti pris de la mise en scène étouffe complètement l'oeuvre de Shakespeare. Cette débauche de moyens techniques, de lumières quasi-psychédéliques est inutile pour montrer la violence à l'oeuvre dans le drame. Le texte dit tout, et il devient inaudible tant il est couvert par ce bruit. Quel malheur de ne pas pouvoir goûter ce texte tel qu'il se présente ! Quel malheur que la voix de Richard III soit si mal articulée, si faible, si contorsionnée ! Mise en scéne adolescente, prétentieuse, tapageuse, désolante. Eric
Le principe qui consiste à éblouir le spectateur (bien placé) par des jeux de lumière qui l'empêche de voir la scène est plutôt étrange.. Beaucoup à redire notamment sur l'interprétation des rôles féminins. La reine est transformée en secrétaire des années 50...Trop excessif. Allez voir Kings of war à Chaillot!
Quel audace, quelle énergie, quelle créativité, quelle vitalité. En 2016, après Hamlet, Roméo et Juliette, Le Roi Lear, voici la plus décapante version de Shakespeare par le génial Thomas Jolly et piccola familia. Un grand spectacle, qui vous scotche pendant 4h30. Le public est conquis, notamment les plus jeunes. Prouesses techniques exceptionnelles (chapeau à l'équipe)! C'est un grand moment à ne pas rater. 400 ans après, Shakepeare doit être fier d'inspirer de tels talents! Le théâtre est entre de bonnes mains avec cette nouvelle génération. Longue vie !!
Mise en scène excellente, comédiens possédés dans une interprétation magistrale, et techniciens son et lumière absolument parfait. Nous avons été captivés et transportés durant 4 heures ! (ce qui est assez rare pour être remarqué!)
N'ayant jamais vu cette pièce auparavant je n'avais aucun a priori sur la mise en scène: dès le début j'ai été conquise, l'interprétation est magistrale, les acteurs et actrices ont une puissance et une énergie rares, le boulot des techniciens du son et des lumières est remarquable. Mise en scène géniale: elle restitue toute la force de Shakespeare et dépoussière la pièce. Je recommande vivement.
Place de l'Odéon 75006 Paris