La pièce se passe en Arménie, au début du christianisme. À peine baptisé, Polyeucte, jeune marié comblé, court au temple briser les idoles païennes afin de faire triompher le seul vrai Dieu à ses yeux ! Il n’a désormais qu’une hâte : renoncer à l’amour de sa femme et mourir en martyr. Les destructions de statues et de temples antiques perpétrées aujourd’hui au nom de la religion et le désir de mort des jeunes convertis offrent une similitude étonnante avec les actes et le destin de Polyeucte. Cela conduit notre équipe à interroger cette œuvre admirable de complexité et d’ambivalence ; et à méditer cette pensée de Nietzsche : « Les martyrs furent un grand malheur dans l’histoire : ils séduisirent… »
La splendide tragédie de Corneille où l’on voit des luttes magnifiques entre le désir amoureux et le désir du martyre, entre le goût de la vie et l’attraction de la mort, peut nous aider aujourd’hui à nous approcher de cette passion religieuse qui nous angoisse autant qu’elle nous fascine. Désir d’excès, désir de mort où des jeunes gens se découvrent eux-mêmes capables d’actes effrayants contre les forces de l’amour, quitte à les sacrifier. Désir d’excès, de briser les « idoles », qui aliène beaucoup plus qu’il ne libère.
Car nous sommes aujourd’hui, dans un temps de ténèbres, et ici et là, exposés à la terreur. Corneille, dans Polyeucte, s’approche d’un gouffre. Le poète est en avance, toujours, et la tragédie assez riche pour qu’aucune réponse univoque ne soit satisfaisante. Mais la mise en scène de ce « mystère » peut nous faire mieux comprendre ce qu’il en est de cette passion effrayante !
Brigitte Jaques-Wajeman
Brigitte Jaques-Wajeman a reçu le Prix de la mise en scène 2016 de la SACD pour Polyeucte.
« Brigitte Jaques-Wajeman fait superbement entendre et comprendre le texte, incarné en élégants costumes d'aujourd'hui. (...) Brigitte Jaques-Wajeman maîtrise l'art de rendre proches et familiers les alexandrins les plus sophistiqués. (...) ce Polyeucte-là devient un passionnant thriller politique et métaphysique, finement interprété par une troupe qu'électrise le texte nourri de sacré. » Fabienne Pascaud, Télérama, 18 février 2016
La mise en scène repose sur de très nombreux partis-pris, tous discutables évidemment, mais intéressants, qui alertent, stimulent. Seul, celui de la lenteur m'a paru excessif
Pour 1 Notes
La mise en scène repose sur de très nombreux partis-pris, tous discutables évidemment, mais intéressants, qui alertent, stimulent. Seul, celui de la lenteur m'a paru excessif
31, rue des Abbesses 75018 Paris